Le silence des engins de construction résonne étrangement sur les berges de la rivière Lubawu. Ici, à quelques kilomètres d’Ilebo, dans la province du Kasaï, un pont effondré raconte une histoire d’abandon qui dure depuis plus de deux ans. Comment une infrastructure aussi vitale peut-elle rester dans cet état de délabrement avancé, tandis que des milliers de personnes luttent quotidiennement pour traverser cette barrière naturelle devenue obstacle au développement ?
Le pont Lubawu, qui reliait le village de Mibalayi à la cité d’Ilebo, s’est effondré il y a plus de 24 mois, plongeant toute une région dans une crise de mobilité aux conséquences socio-économiques désastreuses. Aujourd’hui, les habitants doivent parcourir des dizaines de kilomètres supplémentaires pour rejoindre l’autre rive, quand ils ne risquent pas leur vie en tentant des traversées périlleuses sur des embarcations de fortune.
« Avant l’effondrement, je pouvais vendre mes produits au marché d’Ilebo deux fois par semaine. Maintenant, le trajet est si long et coûteux que je ne peux plus y aller qu’une fois par mois », témoigne Aline Kabedi, commerçante de 42 ans. Son histoire reflète celle de centaines d’autres habitants dont les activités économiques ont été gravement affectées par cette rupture de liaison.
La réhabilitation du pont Lubawu représente bien plus qu’un simple projet d’infrastructure routière en RDC. C’est une question de survie économique pour des communautés entières qui voient leurs échanges commerciaux ralentis, leur accès aux services de santé compromis et leur isolement s’accentuer de jour en jour. Les produits agricoles pourrissent souvent avant d’atteindre les marchés, faute de moyens de transport efficaces.
Les autorités provinciales évoquent régulièrement le manque de moyens financiers et techniques pour expliquer ce retard dans la réhabilitation. Pourtant, la population locale s’interroge : comment peut-on laisser une infrastructure aussi stratégique dans un tel état de délabrement ? Le pont Lubawu n’est-il pas prioritaire pour le développement du Kasaï et la mobilité des populations ?
La situation actuelle à Ilebo illustre les défis plus larges auxquels fait face la République Démocratique du Congo en matière d’infrastructures routières. De nombreux ponts à travers le pays nécessitent une réhabilitation urgente, mais les projets tardent à se concrétiser, laissant des régions entières en marge du développement économique national.
Les conséquences de cet effondrement prolongé du pont Lubawu dépassent le simple inconvénient de mobilité. On observe une augmentation des prix des denrées alimentaires, une baisse de la fréquentation scolaire dans les villages isolés et un accès plus difficile aux centres de santé. Les femmes enceintes et les personnes âgées sont particulièrement affectées par cette situation.
Alors que les saisons se succèdent, la question demeure : quand la réhabilitation du pont Lubawu deviendra-t-elle enfin une priorité pour les décideurs ? Les populations de Mibalayi et d’Ilebo attendent une réponse concrète, espérant que les promesses se transformeront en actions visibles sur le terrain. L’enjeu dépasse la simple reconstruction d’une infrastructure : il s’agit de redonner à toute une région les moyens de son développement économique et social.
Article Ecrit par Chloé Kasong
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