Les tensions politiques à Kinshasa atteignent un seuil critique avec l’arrestation controversée de quatorze députés nationaux, dont trois femmes, survenue vendredi après-midi dans un hôtel de la capitale. Cet incident, intervenant à la veille de l’ouverture de la session parlementaire de septembre 2025, jette une lumière crue sur les fractures au sein de la majorité présidentielle et soulève des questions fondamentales sur l’état de la démocratie congolaise.
Le Réseau des Jeunes Parlementaires, dans une déclaration cinglante, qualifie ces arrestations de “atteinte grave à la dignité des élus du peuple”. Les députés interpellés recueillaient des signatures pour une motion de soutien au bureau de l’Assemblée nationale lorsque les forces de sécurité ont fait irruption. Une opération qui, selon plusieurs observateurs, s’apparente à une tentative d’intimidation des parlementaires jugés trop indépendants.
La description faite par un député sous couvert d’anonymat est pour le moins troublante : embarquement dans un bus militaire, visages couverts de vestes et de pagnes pour éviter l’identification, transfert vers le bureau du Conseil national de cybersécurité. Des méthodes qui rappellent les pires heures de la répression politique et qui interrogent sur la direction que prend la jeune démocratie congolaise.
Le cœur du problème réside dans la violation flagrante de l’immunité parlementaire, pourtant garantie par la Constitution et le Règlement intérieur de l’Assemblée nationale. Cette immunité constitue le rempart essentiel permettant aux élus d’exercer leur mandat en toute indépendance, sans crainte de représailles. Son contournement systématique ne menace-t-il pas les fondements mêmes de l’État de droit ?
Les implications politiques de cette crise sont multiples. D’abord, elle révèle les luttes intestines au sein de la majorité présidentielle, où certains courants semblent vouloir museler les voix dissidentes. Ensuite, elle risque de compromettre le climat de travail parlementaire à un moment crucial où le pays affronte des défis sécuritaires et économiques majeurs. Enfin, elle érode la confiance des citoyens dans les institutions, déjà fragile.
Le Réseau des Jeunes Parlementaires appelle à une clarification urgente des responsabilités et demande des garanties pour que de tels incidents ne se reproduisent plus. Mais au-delà des déclarations de principe, la question centrale demeure : assiste-t-on à une dérive autoritaire masquée ou à simple régulation des excès d’une démocratie en construction ?
La gestion de cette crise par les autorités constituera un test décisif pour la crédibilité des institutions congolaises. Les prochains jours diront si la raison d’État l’emportera sur les calculs politiciens, ou si au contraire, cette affire viendra alimenter le cycle infernal des crises politiques qui ont trop souvent rythmé la vie nationale.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd