Le Nord-Kivu est à nouveau plongé dans l’horreur. Dans la nuit du 8 au 9 septembre, les Forces Démocratiques Alliées (ADF) ont lancé une attaque meurtrière contre le village de Ntoyo, situé à 7 km à l’Est de Manguredjipa dans le territoire de Lubero. Le bilan officiel fait état d’au moins 72 civils massacrés, selon des sources sécuritaires locales.
Le lendemain de cette tragédie, l’insécurité persistante dans l’Est de la RDC a encore frappé. Dix-huit autres personnes ont perdu la vie lors d’une nouvelle attaque au village de Fotodu, dans le territoire voisin de Beni. Cette escalade de violence soulève des questions cruciales sur l’efficacité des mesures de sécurité dans cette région en proie aux conflits armés.
Denis Mukwege, prix Nobel de la paix congolais, a exprimé son indignation face à ces événements tragiques. Dans une publication sur le réseau social X, le célèbre opposant a fermement condamné ce « massacre de plus de 90 personnes » perpétré dans « un vide de gouvernance sécuritaire ». Son message pointe du doigt l’incapacité des autorités à protéger les populations civiles dans les provinces en conflit.
Le docteur Mukwege a dénoncé avec véhémence l’impunité dont bénéficient les auteurs de ces exactions dans une zone pourtant riche en ressources naturelles. « Nous sommes un peuple en danger, livré à lui-même », a-t-il déclaré, mettant en doute l’efficacité des processus de paix de Washington et de Doha pour ramener la stabilité dans cette partie du pays.
Les détails de l’attaque de Ntoyo révèlent une brutalité sans nom. Selon un agent de sécurité interrogé par des médias locaux, 26 victimes ont été exécutées dans une parcelle où se déroulait une veillée mortuaire. Les assaillants ont méthodiquement achevé leurs cibles par balles, semant la terreur parmi la population civile.
Les conséquences de cette attaque ADF dans le Nord-Kivu dépassent le lourd bilan humain. Une centaine de personnes auraient été enlevées par les rebelles, tandis que 16 maisons, 8 motos et deux véhicules ont été réduits en cendres. Ces informations, corroborées par la société civile locale, dressent le tableau d’une région en proie à une violence systématique.
L’État Islamique Daesh a revendiqué ces attaques, affirmant avoir tué « 100 chrétiens » à Ntoyo. Cette revendication intervient dans un contexte sécuritaire déjà extrêmement tendu, où les groupes armés multiplient les exactions contre les populations civiles.
Face à cette tragédie, les autorités de Kinshasa ont condamné avec fermeté ces attaques terroristes. Le gouvernement promet de renforcer les moyens de protection des civils et de restaurer la sécurité dans la région. Mais combien de fois ces promesses ont-elles été formulées sans être suivies d’effets concrets ?
Moïse Katumbi, autre figure politique congolaise, a été le premier à dénoncer ce massacre survenu dans une province pourtant sous état de siège. L’opposant en exil a directement mis en cause les autorités sécuritaires, alertées en vain pour intervenir, appelant Kinshasa à reconnaître « son échec à protéger le droit sacré de la vie ».
Ce nouveau drame dans le territoire de Lubero soulève des interrogations fondamentales sur la capacité de l’État à assurer la sécurité de ses citoyens. Comment expliquer que de tels massacres puissent se produire dans des zones sous état de siège ? Quelle réponse effective peut être apportée face à l’insécurité chronique qui mine l’Est de la RDC ?
La réaction de Denis Mukwege résonne comme un cri d’alarme face à la banalisation de la violence. Son appel à « recouvrer notre humanité et notre dignité » interpelle autant la communauté internationale que les autorités congolaises. Dans un contexte où les richesses minières de la région semblent attiser les conflits, la protection des vies humaines doit redevenir la priorité absolue.
Alors que le bilan définitif de ces attaques continue de s’alourdir, avec des sources évoquant 71 morts et six blessés selon le gouvernement, plus de nombreuses disparitions, la communauté internationale reste silencieuse. Cette indifférence face à la souffrance du peuple congolais est-elle acceptable ?
La situation sécuritaire dans l’Est de la RDC exige une réponse urgente et coordonnée. Les populations civiles, prises en étau entre différents groupes armés, méritent une protection effective et durable. Le massacre de Ntoyo doit servir de électrochoc pour une action décisive contre l’insécurité qui ravage la région depuis des décennies.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd