Dans un contexte où la paix en République démocratique du Congo suscite des débats internationaux, plusieurs figures majeures de l’opposition se voient inexplicablement privées de leur droit à participer aux discussions. Seth Kikuni, ancien candidat à la présidentielle, et d’autres leaders politiques congolais ont été empêchés de se rendre en Afrique du Sud pour la conférence sur la sécurité organisée par la Fondation Mbeki. Une situation qui interroge sur la liberté d’expression et de mouvement des opposants dans l’espace politique congolais.
Comment expliquer ce refus de visa systématique pour des personnalités pourtant officiellement invitées ? La Fondation Mbeki, du nom de l’ancien président sud-africain, avait pourtant insisté sur l’urgence de leur participation à ce dialogue crucial. Les billets d’avion étaient réservés, les agendas libérés, mais une « main obscure » selon les termes de Seth Kikuni, a bloqué leur départ. Cette expression, reprise sur les réseaux sociaux, soulève des questions sur l’indépendance réelle des processus administratifs.
Jean-Marc Kabund, autre opposant de poids, n’a pas mâché ses mots en accusant directement le gouvernement de Kinshasa de « tirer les ficelles ». Le Leadership pour la gouvernance et le développement (LGD), parti de l’ancien premier ministre Matata Ponyo en exil, a subi le même sort. Même l’ancien député national Jean-Claude Kibala s’est vu confisquer son passeport diplomatique à l’aéroport de Ndjili par la Direction générale des Migrations. Une série de coincidences troublantes qui dessinent un pattern inquiétant.
Pendant ce temps, une délégation du Front commun pour le Congo (FCC), incluant des noms comme Néhémie Mwilanya et Aubin Minaku, a pu participer sans encombre à l’ouverture des travaux. Cette conférence de quatre jours, du 3 au 6 août, aborde pourtant des sujets cruciaux : les défis de la SADC et la crise sécuritaire dans l’est de la RDC. La présence de tous les acteurs concernés n’aurait-elle pas été essentielle pour un dialogue véritablement inclusif ?
La Fondation Mbeki, organisatrice de l’événement, se trouve ainsi confrontée à un paradoxe : comment promouvoir la paix et la sécurité en RDC lorsque certaines voix critiques sont systématiquement réduites au silence ? Seth Kikuni parle de « prison à ciel ouvert », une métaphore forte qui résume le sentiment d’étouffement politique que vivent certains opposants. Son message sur X est sans équivoque : « Nous n’allons pas nous soumettre ».
Cette situation pose inévitablement la question de la crédibilité internationale des processus de dialogue sur la RDC. Peut-on véritablement aborder les « causes profondes du conflit » sans inclure toutes les sensibilités politiques ? Le refus de visa pour ces opposants pourrait bien fragiliser la légitimité même de ces discussions, perçues comme partiales ou instrumentalisées.
À l’heure où la communauté internationale appelle à une résolution pacifique des conflits en RDC, ces blocages administratifs selective jettent une ombre sur l’engagement démocratique réel des autorités. La stratégie d’exclusion, si elle devait se confirmer, risquerait à terme d’isoler diplomatiquement le pays plutôt que de renforcer sa position. Les prochains jours, avec la poursuite des travaux de la conférence, diront si l’absence de ces voix dissonantes aura affecté la qualité des conclusions.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd