Dans une intervention remarquée, l’ancien chef de l’État congolais Joseph Kabila Kabange rompt un silence médiatique de plusieurs mois pour dénoncer ce qu’il qualifie de « persécution politique systématique » orchestrée par le régime Tshisekedi. Par une tribune adressée à Jeune Afrique ce 1er septembre, l’ex-président livre une charge sans précédent contre les institutions judiciaires et militaires qu’il accuse d’être instrumentalisées à des fins de règlement de comptes politiques.
Au cœur de ses préoccupations : le procès Joseph Kabila devant le tribunal militaire de Kinshasa, où l’ancien dirigeant encourt la peine capitale pour des accusations allant de la trahison aux crimes de guerre. Kabila dénonce une levée « illégale et anticonstitutionnelle » de ses immunités par le Sénat en mai 2025, ouvrant la voie à ce qu’il présente comme une machination judiciaire. « Ces accusations mensongères et politiquement motivées visent uniquement à faire taire l’opposition », assène-t-il.
L’analyse politique de cette situation révèle des tensions profondes au sein de l’appareil d’État. Le pouvoir actuel jouerait-il une partie d’échecs dangereuse avec les institutions républicaines ? En ciblant systématiquement les hauts gradés des forces armées et de la police – près de soixante arrestations selon Kabila – le régime affaiblirait délibérément les FARDC tout en sapant le moral des troupes. Une stratégie qui, à terme, pourrait menacer la sécurité nationale elle-même.
Sur le plan diplomatique, l’ancien président émet des réserves substantielles concernant l’accord Kinshasa Kigali récemment conclu. Si les pourparlers directs avec le Rwanda représentent une avancée théorique, Kabila note que « l’effusion de sang se poursuit » dans l’Est du pays. Les négociations Doha M23 avec les représentants de l’AFC/M23 semblent également insuffisantes à ses yeux, alors que d’autres groupes armés comme les ADF et les FDLR continuent leurs activités destructrices.
La question qui se pose désormais est celle de la crédibilité internationale de la RDC. Comment les partenaires étrangers perçoivent-ils ces développements politiques ? Kabila les exhorte à « voir au-delà de la façade » et à reconnaître les manœuvres derrière les arrestations massives et les procès spectaculaires. Un appel qui résonne particulièrement alors que la levée des immunités levées Sénat RDC continue de faire débat parmi les constitutionnalistes.
Sur le fond, l’ancien chef de l’État propose une alternative : un dialogue national inclusif regroupant toutes les parties prenantes, y compris la société civile et les chefs religieux. Une position qui contraste avec l’approche actuelle du pouvoir, accusée de privilégier les solutions unilatérales et les règlements de comptes.
Le timing de cette intervention n’est pas anodin. Alors que le procès de l’ancien président entre dans une phase cruciale, cette tribune sonne comme un ultime avertissement au régime en place. La balle est désormais dans le camp de la communauté internationale et des institutions congolaises : continuer sur la voie de la confrontation ou œuvrer pour une réconciliation nationale authentique ?
La réponse à cette question déterminera non seulement l’avenir politique immédiat de la RDC, mais aussi la stabilité à long terme de toute la région des Grands Lacs. Une chose est certaine : Joseph Kabila, par cette sortie médiatique calculée, montre qu’il reste un acteur politique incontournable dont les prises de position continuent de peser sur l’échiquier national.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd