Entre les murs de l’Africa Museum, un souffle nouveau a vibré ce week-end. L’événement Écouter la ville, orchestré par Malafi’arts Production avec le concours des Associations Ateliers Au Fil des Jeux et Bookutani, a transformé l’espace muséal en un laboratoire vivant de mémoire sonore. Près de 80 participants se sont laissés guider à travers une expérience sensorielle unique, où les échos de Kinshasa résonnaient entre installations acoustiques, conférences engagées et performances slam.
Comment la mémoire urbaine peut-elle devenir matière artistique ? La réponse s’est dessinée au fil des parcours immersifs, où les voix congolaises ont dialogué avec l’héritage colonial des lieux. Niamba Malafi, artiste pluridisciplinaire à l’origine de cette démarche, poursuit depuis des années une exploration fascinante des liens entre création artistique, urbanité et transmission mémorielle. Son travail questionne : que reste-t-il des identités culturelles lorsqu’elles traversent les continents ?
La journée a connu son moment de grâce avec le geste poignant d’Émilie Flore Faignond. Cette figure inspirante a offert sa collection personnelle à la future Médiathèque MutuBuku qui portera son nom à Kinshasa. Ce don symbolise plus qu’un transfert d’archives : c’est un pont jeté entre l’Europe et l’Afrique, une réparation concrète par la culture et l’accès au savoir. Dans un monde où les mémoires se fragmentent, such initiatives résonnent comme des actes de résistance.
La soirée s’est achevée en apothéose avec les performances envoûtantes de Miryad’Or, Petit Wendo, Shak Shakito et Micromega. Le foyer du musée, transformé en scène improvisée, a vibré au rythme des créations musicales tandis que le public, conquis, découvrait le lancement officiel de la cagnoute pour la construction de la médiathèque de N’djili. Un projet qui s’inscrit dans la durée, porté par des partenaires engagés comme CIMPE et GINERROSE.
Cet événement culturel à Kinshasa dépasse le cadre d’une simple manifestation artistique. Il esquisse les contours d’une nouvelle diplomatie culturelle où la diaspora, les institutions européennes et les acteurs locaux co-construisent des récits partagés. Malafi’arts Production, basée entre Strasbourg et Kinshasa, incarne cette vision transnationale qui fait de la culture un outil de réinvention citoyenne. Entre installations sonores et résidences d’écriture, leur démarche questionne : comment les artistes congolais en Europe peuvent-ils contribuer à préserver la mémoire culturelle de la RDC ?
La clôture de cette installation sonore à l’Africa Museum marque donc moins une fin qu’un commencement. Celui d’une médiathèque à N’djili qui deviendra sans doute un lieu essentiel pour la préservation de la mémoire collective. Dans une époque où les identités se recomposent, de tels projets rappellent que la culture reste le vecteur le plus puissant pour construire des ponts entre les rives de l’histoire.
Article Ecrit par Yvan Ilunga
Source: Actualite.cd