Vingt-trois ans après la catastrophe naturelle qui a ravagé Goma, des centaines de familles sinistrées Nyiragongo continuent de vivre un calvaire sans fin. Leur parcours témoigne d’une injustice persistante et d’une promesse non tenue par les autorités provinciales Nord-Kivu. Comment en est-on arrivé là ?
Bibiane Lwamira, représentante des sinistrés, confie avec émotion : « Nous vivons dans l’insécurité permanente, avec la peur au ventre. Nos frères ont été tués en tentant de récupérer ce qui nous revient de droit ». Son témoignage illustre le drame humain qui se joue dans l’ombre des conflits territoriaux.
Le cœur du problème réside dans les conflits terres Mugunga où des groupes se présentant comme autochtones ont chassé ces familles en 2017. Depuis, elles errent entre différents sites, incapables de retrouver une stabilité. Les tentatives de retour ont systématiquement dégénéré en violence, créant un climat de terreur qui empêche toute résolution pacifique.
Maître Jean-Marie Vianney Bahati, avocat des sinistrés, s’indigne : « Vingt-trois ans d’attente, c’est inacceptable. Ces personnes ont tout perdu lors de l’éruption volcan Goma 2002 et n’ont jamais pu reconstruire leur vie ». Son constat amer soulève une question cruciale : jusqu’à quand ces familles devront-elles payer le prix de l’inaction des autorités ?
La situation s’est compliquée avec l’arrivée successive de déplacés volcan RDC et de personnes fuyant les conflits armés. Ces superpositions de crises humanitaires ont créé une concurrence pour la terre particulièrement délétère dans une région déjà fragilisée.
Aujourd’hui, avec le départ des déplacés de guerre chassés par l’offensive du M23, les sinistrés de 2002 espèrent enfin voir leur dossier avancer. Mais l’insécurité persistante dans la région compromet toute avancée significative. Les autorités provinciales Nord-Kivu se retrouvent face à un dilemme complexe : comment arbitrer des revendications territoriales ancestrales tout en respectant les droits des victimes de catastrophes naturelles ?
Le volcan Nyiragongo, toujours actif, rappelle régulièrement sa présence menaçante. Les éruptions de 2002 et 2021 ont montré la vulnérabilité de cette région densément peuplée. Pourtant, les leçons du passé semblent insuffisamment tirées, alors que des milliers de personnes continuent de vivre dans une précarité inacceptable.
Cette histoire dépasse le simple conflit foncier. Elle interroge sur la capacité de l’État à protéger ses citoyens les plus vulnérables, sur l’efficacité des mécanismes de reconstruction post-catastrophe, et sur la justice sociale dans une région marquée par des décennies de crises successives.
Alors que le Nyiragongo continue de gronder, menaçant potentiellement des vies humaines, la question des familles sinistrées Nyiragongo reste une blessure ouverte dans le paysage humanitaire de l’est de la RDC. Leur combat pour la dignité et le droit à un logement décent représente un enjeu bien plus large : celui de la reconstruction durable après une catastrophe et de la justice sociale pour toutes les victimes de crises.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net