La Haute Cour militaire de la République démocratique du Congo a prononcé jeudi un verdict d’acquittement général dans l’affaire François Beya Kasonga, mettant fin à plus de deux ans de procédure judiciaire concernant des accusations de complot contre la personne du président Félix Tshisekedi. Cette décision de justice intervient après des délibérations attentives de la part des magistrats militaires, qui ont estimé que les charges retenues contre l’ancien conseiller spécial en matière de sécurité n’étaient pas suffisamment étayées par des preuves concrètes.
L’audience solennelle de jeudi a vu la libération complète de trois des cinq prévenus. François Beya lui-même, ainsi que Guy Vanda Nowa Biama et le colonel Kalenga Kalenga Pierre, ont été lavés de toutes les accusations portées contre eux, notamment celle de « complot contre la vie ou la personne du chef de l’État » qui constituait le chef d’inculpation principal. La cour militaire a estimé que les éléments du dossier ne permettaient pas d’établir avec certitude l’existence d’un tel complot, ni la participation active des prévenus.
Comment la justice militaire en est-elle arrivée à un tel verdict, alors que le ministère public avait requis des peines d’emprisonnement ? La réponse réside dans l’analyse méticuleuse des preuves présentées tout au long de cette instruction complexe. Les juges ont souligné l’absence de témoignages directs corroborant les accusations, ainsi que le caractère fragmentaire des éléments matériels versés au dossier.
En revanche, la commissaire supérieure principale Lily Tambwe Mauwa et le colonel Cikapa Tite Mokili n’ont pas bénéficié du même acquittement total. Ils ont été reconnus coupables du délit de « violation de consignes », une infraction pour laquelle ils avaient déjà purgé leur peine durant leur détention préventive. La cour a donc prononcé leur libération immédiate, considérant que la période d’incarcération préventive couvrait amplement la sanction encourue pour cette infraction.
Le parquet militaire avait pourtant requis, début août, une peine d’un an d’emprisonnement ferme contre François Beya et ses coaccusés, avec six mois de sursis. Les représentants du ministère public avaient invoqué des circonstances atténuantes liées à l’âge et à l’état de santé du principal prévenu, âgé de 69 ans. Cette requête du parquet contrastait avec la plaidoirie de la défense, menée par Me Jeanot Bukoko, qui avait insisté sur l’absence de base factuelle solide pour justifier une condamnation.
L’avocat de la défense avait plaidé l’acquittement pur et simple de tous ses clients, arguant que l’instruction n’avait pas permis d’établir la matérialité des faits reprochés. Me Bukoko avait notamment pointé du doigt les contradictions dans les dépositions des témoins et l’absence de preuves techniques corroborant les accusations de complot contre le président de la République.
L’histoire judiciaire de François Beya remonte au 5 février 2022, date de son arrestation suivie de sept mois de détention préventive. Il avait finalement obtenu une remise en liberté provisoire pour raisons médicales en septembre 2022, avant de rejoindre la France en août de la même année pour y recevoir des soins spécialisés. L’ancien dignitaire du renseignement congolais réside depuis lors sur le territoire français, où il a suivi à distance le déroulement de son procès.
Quelles implications ce verdict aura-t-il sur le paysage politique et sécuritaire congolais ? L’acquittement de François Beya marque un tournant significatif dans cette affaire qui avait défrayé la chronique. Figure historique des services de renseignement, Beya avait servi sous les régimes de Mobutu, Joseph Kabila père et fils, avant d’occuper les fonctions de conseiller spécial du président Tshisekedi.
La décision de la Haute Cour militaire met un point final à cette procédure judiciaire complexe, tout en soulevant des questions sur les mécanismes de contrôle et de responsabilité au sein de l’appareil sécuritaire congolais. L’affaire Beya aura notamment mis en lumière les tensions et les jeux d’influence au sommet de l’État, dans un contexte régional marqué par des défis sécurités multiples.
Ce verdict d’acquittement dans le procès François Beya constitue un rappel du principe fondamental de la présomption d’innocence et de la nécessité de preuves solides dans toute procédure judiciaire, particulièrement lorsqu’il s’agit d’accusations aussi graves que le complot contre le chef de l’État. La justice militaire congolaise a ainsi démontré son indépendance et son attachement aux standards juridiques internationaux.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd