Les caniveaux de Kinshasa retrouvent enfin leur respiration. Alors que les premières gouttes de la saison des pluies menacent de s’abattre sur la capitale congolaise, le gouvernement provincial a déclenché une opération de grande envergure pour désobstruer les artères drainantes de la ville. Une course contre la montre qui soulève autant d’espoirs que d’interrogations parmi les Kinois.
Sur l’avenue Nswala, reliant Pompage à la DGC jusqu’à la route de Matadi, les équipes s’activent avec une détermination remarquable. Pelles, pioches et camions-bennes sont mobilisés pour extraire des années d’accumulation de déchets et de sédiments. Ces caniveaux obstrués, véritables veines de la ville, représentent l’un des principaux facteurs des inondations récurrentes qui paralysent Kinshasa chaque saison des pluies.
À Mont-Ngafula, précisément à l’entrée de la Cité Mama Mobutu, le même scénario se répète. Les ouvriers s’enfoncent dans les conduites engorgées, retirant méthodiquement les obstacles qui entravent l’écoulement des eaux. Un mécanicien de motos rencontré à Barré ne cache pas sa satisfaction : « Enfin une initiative concrète qui bénéficie directement à notre communauté. Ces caniveaux débordants étaient devenus un danger permanent pour nos commerces et nos déplacements. »
Mais derrière l’urgence opérationnelle se cachent des défis structurels persistants. Les habitants, tout en saluant l’effort, pointent deux écueils majeurs : l’évacuation rapide des déchets extraits et la pérennisation de ces travaux. Comment éviter que ces tonnes de détritus, une fois sortis des caniveaux, ne se retrouvent dispersées dans les rues au premier orage ? Quelle garantie que ces opérations ne restent pas ponctuelles mais s’inscrivent dans une stratégie durable d’assainissement urbain ?
Kinshasa, mégapole de près de 15 millions d’habitants, fait face à une pression démographique et environnementale sans précédent. La gestion des eaux pluviales représente un défi crucial pour la résilience urbaine de la capitale congolaise. Les inondations récurrentes ne menacent pas seulement la mobilité ; elles compromettent la santé publique, endommagent les infrastructures et plongent des quartiers entiers dans le chaos aquatique.
Cette opération de curage s’inscrit dans une prise de conscience progressive des autorités face à l’impératif d’adaptation climatique. La saison des pluies, de plus en plus imprévisible et intense en raison des changements climatiques, exige des mesures préventives robustes. Les caniveaux dégagés constituent la première ligne de défense contre l’asphyxie hydrique de la ville.
Reste à savoir si cette mobilisation saisonnière suffira à contrer les défis structurels de l’assainissement à Kinshasa. La question de l’entretien régulier des infrastructures de drainage, la gestion des déchets solides et l’urbanisation incontrôlée continuent de hanter les perspectives à long terme. La population observe, espère, mais attend des preuves tangibles d’une véritable transformation dans la gestion urbaine.
Alors que les équipes s’affairent dans la boue et les détritus, une question persiste : cette opération marque-t-elle le début d’une nouvelle ère dans la gestion des eaux pluviales à Kinshasa, ou simplement un répit temporaire dans le cycle infernal des inondations ? La réponse se jouera autant dans la continuité des efforts que dans la volonté politique de faire de l’assainissement une priorité permanente.
Article Ecrit par Miché Mikito
Source: radiookapi.net