La semaine écoulée a placé la République Démocratique du Congo au cœur de défis stratégiques majeurs, entre tensions diplomatiques inflammables et urgences démocratiques internes. Trois dossiers brûlants ont dominé l’agenda : la nomination contestée d’un consul kényan à Goma, les premières orientations du gouvernement Suminwa II, et l’alerte criante sur le retard des élections locales. Consolate Ngoya, analyste avertie, décrypte pour Congo Quotidien ces enjeux où se joue l’avenir même de la souveraineté congolaise.
La dénonciation par Kinshasa du consulat kenyan à Goma résonne comme un coup de semonce géopolitique. Comment interpréter cette initiative dans une ville partiellement contrôlée par le M23, mouvement rebelle soutenu extérieurement ? Pour Mme Ngoya, licenciée en biologie médicale et observatrice des dynamiques régionales, cette situation « traduit une contradiction majeure » : « L’ouverture d’un consulat dans une zone en crise banalise l’occupation et menace la souveraineté congolaise ». Un constat sans appel qui soulève une question fondamentale : cette manœuvre diplomatique est-elle le prélude à une reconnaissance implicite des zones occupées ? La réponse exige, selon elle, « une diplomatie ferme pour que les intérêts du Congo ne soient pas dilués dans des arrangements régionaux ».
Dans ce contexte volatile, le premier conseil des ministres du gouvernement Suminwa II a esquissé des promesses de renouveau. Le Chef de l’État y a insisté sur la collégialité, l’intégrité et les « résultats tangibles ». Mais ces déclarations suffiront-elles à convaincre une population meurtrie par des décennies de promesses non tenues ? Ngoya exprime une prudence teintée de scepticisme : « Nous voulons croire à une nouvelle dynamique mais craignons une répétition des pratiques de clientélisme et de corruption ». L’épreuve du réel se jouera dans la traduction concrète de ces discours, particulièrement sur le dossier explosif des élections locales RDC.
L’alerte lancée par l’Association des Élus du Territoire Africain (AETA) sur le financement scrutins locaux tombe comme un couperet. Ces scrutins, rappelle l’analyste, sont « essentiels pour rapprocher les citoyens des décideurs et légitimer les autorités locales ». Sans eux, la démocratie congolaise reste « incomplète et centralisée ». Un report supplémentaire, prévient-elle, accentuerait « la méfiance citoyenne » et bloquerait durablement la décentralisation, ouvrant la voie à « des tensions sociales ou même des contestations violentes ». La question financière devient ainsi un baromètre de la crédibilité des institutions.
Parallèlement, le Forum FIJADA a mis en lumière les défis paralysants que relève la jeunesse congolaise. Face au « chômage massif », à la « manipulation politique » et au « manque d’accès aux financements », l’appel à l’innovation sonne parfois comme un vœu pieux. Ngoya dénonce un fossé entre théorie et pratique : « Les obstacles sont nombreux : lourdeurs administratives, corruption et manque de soutien institutionnel ». Constat implacable : sans « incubateurs » et « crédits accessibles », la créativité des jeunes continuera de se heurter au mur des inerties systémiques.
Cette semaine charnière dessine ainsi une équation complexe pour le gouvernement Suminwa II. Entre la gestion du dossier explosif du Consulat kenyan Goma et l’urgence de concrétiser les promesses électorales, la marge de manœuvre est étroite. Les prochains mois révéleront si les beaux principes énoncés en conseil des ministres résisteront à l’épreuve des réalités congolaises. Une certitude s’impose : sans avancées tangibles sur les scrutins locaux et l’intégration de la jeunesse, les fragilités de la démocratie congolaise ne feront que s’aggraver. Le compte à rebours est lancé.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd