L’audience du mercredi 6 août devant la Cour de cassation a été marquée par les révélations accablantes de Marie-Paule Mukadi, directrice générale par intérim de la Direction Générale du Contrôle des Marchés Publics (DGCMP). Sous serment, la haute fonctionnaire a confirmé avoir subi des pressions de la part de l’ancien ministre de la Justice Constant Mutamba dans le dossier sensible de la construction de la prison centrale de Kisangani.
Selon le réquisitoire du ministère public, la renseignante avait déclaré lors de l’instruction préparatoire que Constant Mutamba lui aurait demandé d’autoriser irrégulièrement le recours à une procédure de gré à gré. Des allégations que l’ancien ministre et son conseil ont catégoriquement réfutées en audience. Le prévenu reconnaît certes avoir convié la directrice de la DGCMP dans son bureau, mais soutient que cette rencontre s’inscrivait dans le cadre de travaux collaboratifs entre services étatiques, par l’entremise de son directeur de cabinet.
Les déclarations sous serment de Marie-Paule Mukadi ont cependant jeté une lumière crue sur les dysfonctionnements entourant ce projet pharaonique. Elle a exposé ses réserves concernant l’attribution du marché à la société Zion, dont l’inexpérience flagrante dans le secteur de la construction et la jeunesse institutionnelle – à peine une année d’existence – constituaient des anomalies manifestes. Comment une telle entreprise a-t-elle pu décrocher un contrat d’une telle envergure ? La question plane lourdement sur cette procédure judiciaire.
Plus troublant encore, la directrice a.i de la DGCMP a détaillé les modifications financières suspectes intervenues après l’octroi initial. Alors que l’autorisation délivrée portait sur un montant de 39 millions de dollars américains, l’autorité contractante aurait ultérieurement ramené ce coût à 29 millions. Cette réduction inexpliquée de 10 millions ouvre la porte à des interrogations sur la destination réelle des fonds publics. Constant Mutamba est formellement poursuivi pour détournement de 19 millions de dollars dans cette affaire emblématique de corruption à Kisangani.
Le parquet a souligné la concordance entre les déclarations écrites de la témoine durant l’enquête préparatoire et sa déposition orale. Cette constance dans les accusations d’intimidation pourrait peser lourd dans la balance, alors que le dossier de détournement de fonds publics s’appuie sur des preuves documentaires relatives aux dysfonctionnements des marchés publics en RDC. La prochaine audience déterminera si les éléments à charge justifient un renvoi devant la juridiction de fond.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd