Ce 6 août 2025, Hiroshima commémore sous tensions géopolitiques le 80e anniversaire du premier bombardement atomique de l’histoire. Alors que 120 délégations internationales se rassemblent dans la ville martyre, l’absence conjointe de la Russie et de la Chine frappe par son symbolisme. Ces deux puissances nucléaires, engagées respectivement en Ukraine et dans la course aux armements, ont décliné l’invitation aux cérémonies, tout comme le Pakistan. Une décision qui contraste avec la présence inédite de Taïwan et de la Palestine, pourtant non reconnus officiellement par Tokyo.
La commémoration d’Hiroshima survient dans un contexte international alarmant. Le maire Kazumi Matsui a dénoncé la veille « l’existence de dirigeants voulant renforcer leur puissance militaire pour résoudre les conflits », allusion transparente aux guerres en Ukraine et au Proche-Orient. Son avertissement résonne particulièrement après les déclarations controversées de Donald Trump, qui avait comparé les frappes récentes contre l’Iran aux bombardements de 1945. « Il ne saisit pas pleinement la réalité des bombardements atomiques », avait alors répliqué Matsui, soulignant leur « menace pour la survie de l’humanité ».
Le choix politique des invitations révèle un changement notable. Contrairement à l’habitude, le Japon a simplement « notifié » tous les pays sans sélection préalable, permettant ainsi la participation historique de Taïwan. Cette présence taïwanaise à Hiroshima intervient tandis que Pékin intensifie ses pressions sur l’île, ajoutant une dimension diplomatique sensible aux cérémonies. La Palestine, observateur permanent à l’ONU mais sans reconnaissance étatique universelle, marque également sa première apparition.
Face à ces absences remarquées, les survivants de la bombe atomique, les « hibakusha », ont lancé un appel solennel. Toshiyuki Mimaki, coprésident du groupe Nihon Hidankyo et lauréat du prix Nobel de la paix 2024, insiste : « Les guerres continuent dans le monde entier, rendant crucial ce rassemblement dans la ville martyre ». Son organisation, qui s’appuie sur les témoignages des derniers survivants d’Hiroshima et Nagasaki, presse les États nucléaires d’accélérer le désarmement. Un message d’autant plus urgent que la génération des hibakusha s’éteint progressivement, emportant avec elle la mémoire vive des 214 000 victimes des deux bombardements.
Les ruines du Dôme de Genbaku, classé à l’UNESCO, se dressent toujours au cœur de la métropole de 1,2 million d’habitants, rappelant l’horreur du 6 août 1945. À 8h15 ce matin, l’heure exacte où la bombe « Little Boy » anéantissait la ville, une minute de silence a été observée. Les cloches ont retenti tandis que des fleurs flottaient sur les eaux de la rivière Motoyasu, dans un rituel empreint de solennité. La France, représentée par le numéro deux de son ambassade, et l’Union européenne figuraient parmi les participants, contrastant avec le vide laissé par Moscou et Pékin.
Cette commémoration d’Hiroshima intervient alors que les tensions nucléaires atteignent un niveau inédit depuis la Guerre froide. L’Iran, accusé de développer l’arme atomique, a pourtant dépêché une délégation, soulignant les paradoxes du moment. Les déclarations du maire Matsui résonnent comme un testament politique : « L’arme atomique rend difficile l’instauration de la paix mondiale ». Quatre-vingts ans après le champignon nucléaire, le spectre de l’apocalypse plane toujours sur l’humanité, et les survivants de la bombe atomique pourraient bientôt manquer pour en témoigner.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: mediacongo.net