Nairobi s’apprête à accueillir ce vendredi 1er août un sommet conjoint décisif des Chefs d’État et de gouvernement de la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC) et de la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC). Cette rencontre stratégique, la première depuis mars dernier, vise à harmoniser les réponses régionales à la crise sécuritaire qui mine l’est de la République démocratique du Congo, avec un objectif central : préserver la souveraineté et l’intégrité territoriale congolaises.
Selon l’agenda officiel consulté par nos confrères, les travaux s’ouvriront par les interventions des secrétaires généraux des deux organisations régionales avant de donner la parole à Mahamoud Ali Youssouf, président de la Commission de l’Union africaine. Le groupe des facilitateurs du processus de paix – élargi de trois à cinq membres – présentera son analyse, tandis que Robert Dussey, ministre togolais des Affaires étrangères, exposera les avancées de la médiation entre Kinshasa et Kigali. Le Togo joue en effet un rôle pivot dans l’apaisement des tensions entre les deux capitales.
Ce sommet régional survient dans un contexte diplomatique paradoxal. D’un côté, deux initiatives internationales semblaient ouvrir des perspectives : l’accord de paix Kinshasa-Kigali parrainé par les États-Unis à Washington fin juin, et la déclaration de principes signée à Doha entre le gouvernement congolais et la rébellion du M23 sous l’égide du Qatar. Ces textes étaient présentés comme des percées majeures pour stabiliser la région des Grands Lacs. Mais sur le terrain, la réalité contredit les signatures protocolaires.
Près de dix jours après Doha, les mesures de confiance censées préparer les négociations finales restent lettre morte. Le chronogramme exigeant prévu par l’accord – reprise des pourparlers avant le 8 août et signature d’un accord global le 17 août – semble déjà compromis. Comment expliquer ce fossé entre engagements politiques et réalisations concrètes ? Les observateurs pointent l’absence de mécanismes contraignants et la méfiance persistante entre belligérants. La situation sécuritaire sur le terrain, marquée par des accrochages récurrents, ne favorise guère le climat de dialogue.
Le sommet EAC-SADC représente dès lors une tentative cruciale de relancer la dynamique. Les facilitateurs devront proposer des solutions opérationnelles pour débloquer l’impasse, notamment en alignant le processus de paix de Washington avec les négociations de Doha. L’enjeu dépasse la seule RDC : il s’agit d’éviter une contagion régionale de l’instabilité. Les participants étudieront aussi le renforcement de la mission régionale de la SADC (SAMIDRC), dont les troupes peinent à contenir l’avancée des groupes armés.
Toute la difficulté réside dans l’articulation des multiples initiatives diplomatiques. Le processus paix Washington Doha peut-il être consolidé par une feuille de route régionale ? Les divergences historiques entre l’EAC (où siège le Rwanda) et la SADC (solidaire de la RDC) compliquent la recherche de consensus. Pourtant, l’urgence commande l’unité : chaque jour de retard dans la mise en œuvre des accords nourrit l’insécurité dans les provinces du Kivu et aggrave la crise humanitaire.
Ce sommet de Nairobi constitue ainsi un test décisif pour la crédibilité des organisations sous-régionales africaines. Leur capacité à imposer une vision commune et des actions coordonnées sera scrutée par les populations congolaises directement affectées. Sans avancées concrètes sur le désarmement des groupes armés et le retrait des forces étrangères, les beaux discours risquent de se heurter à nouveau à la dure réalité des combats. La diplomatie des Grands Lacs parviendra-t-elle cette fois à transformer l’essai ?
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd