Le visage creusé par les années d’attente, Donat Katumbi, représentant des retraités de la Minière de Bakwanga (MIBA), laisse enfin échapper un sourire. “C’est un jour que nous n’espérions presque plus”, confie-t-il, la voix nouée par l’émotion. Après des décennies d’incertitude, un protocole d’accord historique vient d’être scellé à Kinshasa, débloquant plus de 8 millions USD pour 1 047 anciens travailleurs de ce géant minier congolais en crise.
Conclu sous les auspices du ministre des Finances, ce protocole tripartite entre l’État congolais, la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS) et la MIBA matérialise la décision du Conseil des ministres du 23 août 2024. Joëlle Kabena Mumba, coordonnatrice de l’Unité de gestion du projet d’appui financier, souligne : “Ce fonds débloqués MIBA avant mi-août marque l’entrée dans la phase active de la relance. C’est la preuve que la sécurité sociale Congo peut fonctionner quand les institutions collaborent”.
Dans les ruelles poussiéreuses de Mbuji-Mayi, la nouvelle électrise les quartiers où survivent les retraités. Beaucoup ont vendu leurs biens pour soigner des maladies contractées dans les mines de diamants. “Comment croire qu’après 30 ans sous terre, on meure de faim devant des richesses qu’on a extraites ?” s’interroge un ancien foreur, montrant son carnet de cotisations jauni. Cette injection financière représente plus qu’une bouffée d’oxygène : c’est la reconnaissance d’une dignité bafouée.
Pourtant, derrière l’allégresse perce l’inquiétude. Le président de la délégation syndicale nationale de la MIBA lance un appel pressant : “Si ce protocole CNSS RDC soulage nos aînés, qu’en sera-t-il des 3 500 travailleurs actifs dont les salaires stagnent depuis des mois ? La relance Minière de Bakwanga doit être globale”. Un plaidoyer qui résonne dans les bureaux délabrés de la société, où le personnel guette des signes concrets de renaissance.
Du côté des institutions, l’optimisme prévaut. Clavin Kabamba, coordonnateur au ministère des Finances, se félicite des “résultats tangibles” obtenus. Lina Lukiana, directeur du recouvrement à la CNSS, renchérit : “Nous sommes prêts à accompagner ce processus jusqu’à son terme. Ces fonds débloqués MIBA fondent une nouvelle ère pour la protection sociale des travailleurs miniers”.
Cette avancée pose cependant des questions cruciales : ce modèle de sauvetage social pourra-t-il s’appliquer à d’autres entreprises publiques en détresse ? La sécurisation des paiements évitera-t-elle les détournements qui ont miné tant de projets ? Alors que la RDC tente de redorer son blason minier, ce dossier teste sa capacité à concilier relance économique et justice sociale. Le véritable diamant brut, finalement, n’est-il pas cette prise de conscience que les richesses du sous-sol doivent d’abord profiter à ceux qui les extraient ?
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net