Addis-Abeba vibre au rythme d’un enjeu planétaire crucial : le sommet des Nations unies sur les systèmes alimentaires (UNFSS+4), ouvert ce dimanche 27 juillet 2025 pour trois jours de travaux intensifs. La République Démocratique du Congo y est représentée par son ministre d’État chargé de l’agriculture et sécurité alimentaire, Grégoire Mutshail Mutomb, mandaté par le chef de l’État. Placé sous le thème « la transformation des systèmes alimentaires pour un avenir durable et résilient », ce rendez-vous international constitue une étape décisive pour évaluer les progrès accomplis depuis le premier sommet de 2021 et accélérer la réalisation des Objectifs de développement durable (ODD).
Quatre ans après les engagements de Rome, où la communauté internationale s’était fixé l’ambition d’éradiquer la faim d’ici 2030, l’heure est au bilan. Les participants, parmi lesquels figurent délégations étatiques et experts, dresseront un état des lieux sans concession de la sécurité alimentaire mondiale. Comment expliquer que près de 735 millions de personnes souffrent encore de sous-alimentation chronique selon la FAO, alors que les ODD visant l’éradication de la faim et de la malnutrition étaient présentés comme une priorité absolue ? Le constat s’annonce sévère : les crises climatiques, les conflits armés et les chocs économiques ont considérablement ralenti les avancées, particulièrement en Afrique.
Dans ce contexte tendu, l’intervention du ministre agriculture RDC retiendra toute l’attention. Grégoire Mutshail Mutomb exposera une analyse percutante sur le thème « Dette et sécurité alimentaire en contextes complexes : explorer des solutions durables aux crises prolongées ». Son plaidoyer mettra en lumière le cercle vicieux qui lie l’endettement des États vulnérables à leur incapacité à investir dans des systèmes agricoles résilients. La RDC, dont près de 64% de la population vit en insécurité alimentaire selon le Programme alimentaire mondial, incarne ces défis multidimensionnels. Entre remboursements de dette et besoins urgents de financement agricole, les marges de manœuvre se réduisent comme peau de chagrin.
L’architecture financière internationale sera au cœur des débats. Mutshail Mutomb devrait appeler à des mécanismes innovants pour restructurer les dettes souveraines, arguant que sans allègement significatif, aucun programme durable de sécurité alimentaire ne pourra voir le jour dans les pays en proie à des crises prolongées. Son discours s’inscrit dans une réflexion plus large sur la réorientation des fonds vers l’agroécologie et les circuits courts, seuls capables de briser la dépendance aux importations. Les observateurs notent que cette position rejoint les alertes récentes du Fonds monétaire international sur l’urgence d’intégrer la sécurité alimentaire dans les stratégies d’allègement de la dette.
Les enjeux dépassent largement le cadre technique. À moins de cinq ans de l’échéance des ODD, ce sommet ONU sécurité alimentaire sonne comme un ultime avertissement. Les systèmes alimentaires mondialisés montrent leurs limites face aux chocs exogènes, comme l’ont cruellement rappelé les récentes crises ukrainienne et pandémique. L’Afrique, qui importe encore 85% de ses produits transformés, paie un lourd tribut à cette fragilité. Pourtant, le continent dispose d’un potentiel inexploité : avec 65% des terres arables non cultivées de la planète, dont 80 millions d’hectares en RDC seule, la solution pourrait bien venir d’une relocalisation stratégique des productions.
La conclusion des travaux ce mercredi 30 juillet s’annonce déterminante. Soit la communauté internationale parviendra à dégager des engagements concrets pour transformer la dette en leviers d’investissement agricole, soit l’objectif d’éradication de la faim rejoindra la longue liste des promesses non tenues. Dans cette course contre la montre, la voix de la RDC à Addis-Abeba porte l’espoir de millions de Congolais qui voient chaque jour leur assiette se vider au rythme des fluctuations économiques globales.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd