Dans un contexte de tensions frontalières récurrentes, le village d’Oyo dans la Cuvette congolaise accueille depuis lundi une manœuvre diplomatique d’envergure. Jacquemain Shabani, numéro deux du gouvernement de Kinshasa chargé de l’Intérieur et de la Sécurité, pilote personnellement la délégation de la République Démocratique du Congo lors de deux sessions bilatérales cruciales avec la République du Congo.
Ces rencontres bilatérales RDC Congo, organisées en terre oyolaise, matérialisent la 11e session spéciale de la Commission défense et sécurité et la 10e session de la Commission technique mixte dédiée aux questions frontalières. Face à Jacquemain Shabani, le ministre congolais de l’Intérieur Zéphirin Mboulou représente les intérêts de Brazzaville dans ce dialogue à haut risque. Quelle stratégie adopter pour sécuriser près de 2 500 km de frontières poreuses où circulent trafics et groupes armés ?
L’enjeu central de ces assises réside dans la sécurité frontalière RDC, épine dorsale des relations entre les deux capitales voisines. Les discussions techniques s’articulent autour d’un double défi : endiguer l’insécurité transfrontalière tout en accélérant la démarcation territoriale Congo, dossier sensible où les contentieux historiques ressurgissent périodiquement. Les observateurs régionaux soulignent l’urgence d’une cartographie précise pour prévenir les conflits communautaires.
La présence de Jacquemain Shabani Oyo symbolise la volonté affichée par Félix Tshisekedi de prioriser ce dossier. Le choix du village d’Oyo comme cadre des négociations n’est d’ailleurs pas anodin : cette localité frontalière incarne physiquement les défis de cohabitation entre les deux nations sœurs. Les discussions s’annoncent complexes sur la gestion coordonnée des flux migratoires et la lutte contre les réseaux criminels qui exploitent les failles des dispositifs sécuritaires actuels.
Cette commission mixte RDC-Congo représente un test décisif pour la diplomatie préventive dans la région. Si les précédentes sessions ont abouti à des déclarations d’intention, les parties semblent désormais poussées par une réelle urgence opérationnelle. La montée des activités des groupes armés dans les provinces frontalières de la RDC exige des mécanismes concrets de coopération policière et militaire.
En filigrane, ces négociations interrogent la capacité des deux États à transcender leurs rivalités historiques. Le partage des ressources naturelles transfrontalières et la gestion des populations autochtones divisées par les frontières coloniales ajoutent une couche de complexité aux travaux techniques. Comment construire une souveraineté partagée sans heurter les susceptibilités nationales ?
Les conclusions de ces assises devraient aboutir à un plan d’action conjoint avec échéancier contraignant, incluant potentiellement des patrouilles mixtes et un système d’alerte précoce. Pour Kinshasa comme pour Brazzaville, l’enjeu dépasse la simple sécurisation des territoires : il s’agit de poser les bases d’une intégration régionale apaisée dans un bassin géopolitique volatil. La crédibilité de cette commission mixte RDC-Congo se mesurera à l’aune des réalisations concrètes sur le terrain dans les prochains mois.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: radiookapi.net
