Dans le paysage politique tourmenté du Maniema, l’appel lancé par David Amuri Amundala, spécialiste en gouvernance provinciale et territoriale, résonne comme un coup de semonce. Son exhortation aux bourgmestres et conseillers municipaux à collaborer jusqu’aux élections locales traduit-elle l’échec latent d’une transition institutionnelle ? La province semble en effet minée par des tensions croissantes entre autorités nommées et élus locaux, une fracture qui menace les fondements mêmes de la décentralisation.
Selon l’expert, dont l’analyse fait autorité dans les cercles de gouvernance des Entités territoriales décentralisées (ETD), le refus catégorique de certains bourgmestres de se soumettre au contrôle des conseils municipaux constitue rien moins qu’un « outrage institutionnel ». Ce constat sévère soulève une question brûlante : jusqu’à quel point les nominations administratives peuvent-elles contourner les mécanismes démocratiques dans cette région de la RDC ? « Il est inconcevable qu’un bourgmestre nommé refuse le contrôle de son autorité. Le conseil municipal est l’organe légalement habilité à exercer cette fonction », a martelé Amuri lors d’une déclaration publique percutante.
Cette mise en garde intervient dans un contexte où les conflits entre autorités locales atteignent un paroxysme inquiétant. Le spécialiste rappelle avec force que la loi exige que les ETD soient gérées par des autorités élues et contrôlées par des assemblées locales également issues du suffrage universel. Pourtant, le Maniema, comme tant d’autres provinces, n’a pas organisé d’élections locales depuis des années, créant un vide propice aux dérives autoritaires. Les nominations, conçues comme des solutions transitoires, se transforment-elles en gouvernance parallèle ?
La perspective des élections locales au Maniema, désormais engagée sous l’égide de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), devrait en principe apaiser ces tensions. Mais David Amuri insiste sur un principe intangible : la nomination ne saurait exonérer de redevabilité. « Les bourgmestres doivent respecter les mécanismes de contrôle démocratique en vigueur », assène-t-il, soulignant que cette période interélectorale exige plus que jamais un respect scrupuleux des équilibres institutionnels.
L’enjeu dépasse la simple coordination technique entre bourgmestres et conseillers municipaux. Il touche à la crédibilité même du processus de décentralisation en RDC. La résistance des administrateurs nommés face au contrôle parlementaire local ne risque-t-elle pas d’enraciner une culture de l’impunité ? Amuri, en spécialiste averti de la gouvernance des ETD, pointe un paradoxe explosif : ceux-là mêmes chargés de préparer le terrain pour des élections démocratiques en minent les principes fondamentaux.
La balle est désormais dans le camp des autorités provinciales et de la CENI. Le calendrier électoral tant attendu pourra-t-il restaurer la légitimité des institutions locales ? Ou assiste-t-on à l’émergence d’une gouvernance hybride où le provisoire s’érige en norme ? La mise en garde de David Amuri sonne comme un ultime rappel : sans redevabilité immédiate, la transition vers des institutions pleinement démocratiques au Maniema risque de n’être qu’un vœu pieux. Les prochains mois révéleront si les acteurs locaux entendent cette alerte ou persistent dans un jeu dangereux pour la stabilité régionale.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net