Le contraste est saisissant entre les ambitions affichées et la piètre réalité de terrain. Près de cinq mois après le lancement en grande pompe du plan stratégique pour le climat des affaires par le président Félix Tshisekedi, la Première ministre Judith Suminwa Tuluka dresse un constat accablant : l’exécution des assignations ministérielles traîne dangereusement en longueur. Lors de la 53e réunion du Conseil des ministres, le ton est passé des déclarations d’intention à l’ultimatum.
« Face au niveau d’exécution observé qui reste faible, en dépit des objectifs clairement définis », a-t-elle martelé, exigeant une mobilisation immédiate de chaque ministre concerné. Cette sortie publique, inhabituelle par sa fermeté, révèle-t-elle les fissures d’une machine gouvernementale grippée ? La cheffe du gouvernement a ordonné au Vice-Premier ministre chargé du Plan d’organiser d’urgence une évaluation exhaustive des progrès réalisés, avec un rapport attendu pour le 1er septembre 2025 au plus tard. Une feuille de route qui se veut autant un mécanisme de redevabilité qu’un électrochoc pour une administration souvent accusée de léthargie.
Rappelons qu’en mars dernier, le président Tshisekedi avait lui-même présidé le lancement solennel de ce « Plan stratégique Climat des affaires pour la transformation structurelle de l’économie ». Devant un parterre de décideurs à la Cité de l’Union africaine, il avait énuméré les maux chroniques étouffant l’économie congolaise : « lourdeurs administratives, insécurité juridique et judiciaire, complexité fiscale et parafiscale ». Sept mois étaient alors impartis pour élaborer des solutions concrètes devant faciliter la création d’entreprises, réformer le système fiscal et valoriser le « Made in Congo ».
Or, ce coup de semonce de Judith Suminwa intervient dans un contexte de défiance accrue. Les résultats du Baromètre national du climat des affaires (BNCA) publiés en 2023 avaient déjà sonné l’alarme avec un score calamiteux de 37/100. Comment expliquer ce décalage entre les annonces présidentielles et la mise en œuvre gouvernementale ? Les observateurs pointent du doigt l’absence de mécanismes contraignants et le traditionnel cloisonnement ministériel, deux tares dont semble désormais consciente la Première ministre.
L’enjeu dépasse la simple technocratie : la crédibilité internationale de la RDC se joue dans cette bataille pour l’assainissement du climat des affaires. Félix Tshisekedi en avait fait un « pilier fondamental » de son quinquennat, promettant de répondre aux doléances des opérateurs économiques. L’échéance de septembre 2025 constituera désormais un test décisif. Si les ministres concernés ne passent pas de la parole aux actes, ce ne sera pas seulement un plan qui échouera, mais toute la stratégie de relance économique du pays qui vacillera. La balle est dans le camp du gouvernement : sa capacité à transformer les diagnostics en remèdes tangibles sera scrutée à la loupe par des investisseurs encore sceptiques.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd