Dans une analyse économique sans concession, le professeur Romain Kabongo Tchissens dévoile les mécanismes ayant conduit à l’effondrement des entreprises publiques congolaises. Présenté jeudi à l’Université Pédagogique Nationale, son ouvrage « Gouvernance des entreprises publiques en République Démocratique du Congo : des sociétés à chartes aux sociétés commerciales, une déliquescence programmée » constitue une radiographie implacable de six décennies de mauvaise gestion. Selon ses recherches publiées chez L’Harmattan, le secteur aurait perdu près de 85% de sa valeur productive depuis l’indépendance.
Comment expliquer ce naufrage institutionnel ? L’auteur identifie une combinaison toxique : corruption endémique, ingérence politique chronique et réformes incohérentes. « La déliquescence a été programmée », assène Kabongo, démontrant que chaque régime successif a contribué à saper les fondements des fleurons nationaux. Des sociétés minières aux services publics, ces entités ressemblent désormais à des « coquilles vides » ayant perdu leur substance économique. Une situation qui interroge fondamentalement la gouvernance des entreprises publiques en RDC et leur capacité à servir l’intérêt général.
Le diagnostic s’appuie sur des indicateurs sans appel : seulement 12% des entreprises d’État congolaises atteignent aujourd’hui leur seuil de rentabilité, tandis que les pertes cumulées représentent 1,8 fois le budget national annuel. Le professeur Dieudonné Luaba, présent à la cérémonie, renchérit : « Dans un monde dominé par la mondialisation, comment envisager le développement sans entités productives et compétitives ? ». Cette déliquescence des entreprises étatiques obère toute perspective de souveraineté économique.
L’ouvrage ne se limite pas au constat. Structuré en six chapitres analytiques, il propose une feuille de route pour la réforme des sociétés publiques au Congo. Kabongo plaide pour une révolution managériale : indépendance des nominations, transparence comptable obligatoire, et responsabilisation élargie à toutes les parties prenantes. « La reddition des comptes n’est pas optionnelle », insiste-t-il, appelant à une rupture avec les pratiques clientélistes.
Symboliquement baptisé par l’ancien Premier ministre Évariste Mabi Mulumba, ce manifeste réformateur arrive à point nommé alors que le gouvernement actuel annonce une modernisation du secteur para-étatique. La pertinence de l’analyse économique sur les entreprises RDC réside dans sa dimension historique, retraçant l’évolution légale et financière depuis 1960. Une contribution essentielle pour qui veut comprendre les racines de la crise et éviter les erreurs du passé dans la reconstruction économique nationale.
Article Ecrit par Amissi G
Source: Actualite.cd