Dans un contexte marqué par des interrogations croissantes sur la gestion des fonds publics, le Centre de recherche en finances publiques et développement local (Crefdl) a orchestré ce mercredi 23 juillet 2025 à Kinshasa une rencontre cruciale avec une dizaine de députés nationaux. Issus des provinces de Kwango, Kwilu, Kongo-Central et Kasaï, ces élus ont été interpellés sur leur rôle dans le contrôle citoyen du Projet de développement local des 145 territoires (PDL-145T), un programme financé par le National Endowment for Democracy (NED). L’objectif? Les inciter à s’approprier le récent rapport du Crefdl pointant des dysfonctionnements alarmants dans l’exécution des infrastructures Congo.
Valéry Madianga, coordonnateur national du Crefdl, a martelé lors des échanges : « Il faudrait que les élus du peuple puissent poser des questions claires à tous ceux qui ont géré les fonds publics. Nous nous sommes mis d’accord pour des initiatives parlementaires, notamment une question orale avec débat. » Cette démarche de redevabilité projets RDC s’inscrit dans une stratégie plus large de plaidoyer visant à transformer le rapport en levier d’action politique. Les députés présents ont d’ailleurs proposé d’étendre la sensibilisation à l’ensemble du caucus national – une suggestion accueillie favorablement, tant le PDL-145T concerne l’intégralité du territoire congolais.
Mais que révèle ce rapport tant discuté? Les conclusions sont accablantes. Dans la province du Kasaï, le taux de livraison des ouvrages confiés au PNUD s’élève à un consternant 0%, malgré un financement intégral du gouvernement augmenté de 70 millions USD. Sur 69 infrastructures attendues, 35 chantiers ont été lancés depuis 2023, mais un seul approche la livraison tandis que 34 n’ont jamais démarré. Comment justifier une telle inertie alors que les communautés locales attendent des écoles, des centres de santé et des routes?
L’autre agence d’exécution, le CFEF, affiche un taux de réalisation d’environ 65% – chiffre en apparence plus favorable. Pourtant, le Crefdl soulève un problème majeur : les travaux traînent depuis près de deux ans, dépassant largement le délai contractuel initial de six mois. Cette lenteur risque de violer l’article 56 du décret n°23/12 régissant les marchés publics, ouvrant la voie à des recours juridiques. Plus inquiétant encore, 99% des centres de santé déjà livrés dans ces provinces fonctionnent sans équipements médicaux de base. Un investissement fantôme?
Le taux exécution PDL-145T devient ainsi un symbole des lacunes structurelles de la gouvernance congolaise. Les députés contrôle citoyen se retrouvent désormais en première ligne pour exiger des comptes. Leur mobilisation sera-t-elle à la hauteur des enjeux? La promesse de questions orales au parlement constitue un premier pas, mais le vrai test résidera dans leur capacité à traduire ces échanges en pression politique tangible. Après tout, qui assumera la responsabilité de ces retards systématiques et de ces fonds engloutis dans des projets inachevés?
Alors que la première phase du PDL-145T s’apparente à un naufrage financier, la balle est désormais dans le camp des représentants du peuple. Leur vigilance conditionnera non seulement la crédibilité des futures initiatives de développement local, mais aussi la confiance des bailleurs internationaux. Le prochain acte de ce drame institutionnel se jouera sous les ors du parlement, où les excuses techniques ne suffiront plus à étouffer les demandes de transparence.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd