Jacques Kyabula réapparaît à Lubumbashi après une disparition politique

Dans un rebondissement digne des jeux d’échec politiques congolais, Jacques Kyabula Katwe, gouverneur du Haut-Katanga, a fait une apparition publique aussi soudaine que théâtrale ce jeudi à Lubumbashi. L’homme, dont la disparition alimentait les spéculations depuis plusieurs jours, saluait militants de l’ARDev parti politique et supporters du FC Saint-Éloi Lupopo devant sa résidence, comme pour afficher une normalité retrouvée.

Cette mise en scène survient après une séquence révélatrice des tensions sous-jacentes au pouvoir : la veille, mercredi, les membres du Conseil sécurité provincial s’étaient déplacés à son domicile, missionnés officieusement pour localiser un gouverneur devenu introuvable. Une situation paradoxale née du manquement de Kyabula à une convocation cruciale à Kinshasa, où le vice-premier ministre de l’Intérieur Jacquemain Shabani l’attendait pour des consultations. L’absence prolongée avait conduit la DGM à émettre un avis de recherche le 18 juillet, mesure administrative rare pour un haut responsable.

Quels calculs se cachent derrière cette éclipse soudaine ? Les déclarations incendiaires du gouverneur lors d’un meeting à Lubumbashi semblent avoir allumé la mèche. En qualifiant Joseph Kabila et Corneille Nangaa de « Congolais » avec qui régler les différends « en famille » tout en désignant le Rwanda comme l’adversaire principal à l’est, Kyabula a joué avec les lignes rouges du pouvoir. Des propos qui résonnent étrangement dans un contexte où l’ombre de l’ancien président plane sur les soutiens présumés aux groupes armés comme l’AFC et le M23.

Selon nos sources au ministère de l’Intérieur, cette prise de position autonome aurait motivé une mise en retrait temporaire, avec délégation d’intérim à son vice-gouverneur. Le gouverneur invoque des raisons de santé pour justifier son absence – explication qui soulève plus de questions qu’elle n’apaise les doutes. Son retour programmé à Kinshasa ce week-end ressemble à une tentative de désamorçage, mais le bras de fer politique n’est peut-être que suspendu.

Cette affaire révèle-t-elle les fissures d’une gouvernance en équilibre instable ? Entre convocation ignorée, disparition inexpliquée et réapparition orchestrée, le parcours de Jacques Kyabula dessine les contours d’un rapport de force entre centre et périphérie. Les prochains jours à Kinshasa diront si cette crise se solde par un rappel à l’ordre ou une fragile réconciliation. Le Haut-Katanga retient son souffle, conscient que la stabilité provinciale se joue désormais dans les couloirs du pouvoir central.

Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd