La scène, capturée dans une vidéo devenue virale ce mercredi, dépeint un moment de paradoxe saisissant dans l’univers électrique du rap congolais. Gaz Fabilouss, figure controversée, tend des billets froissés à C2B, étoile montante du hip-hop kinois, tandis que ce dernier déclame son couplet brûlant extrait du tube “Kabasele”. L’image, diffusée comme une traînée de poudre sur les réseaux sociaux, montre le rappeur empocher 400 dollars sous le commentaire narquois de Fabilouss : « Meilleur rappeur du moment. Et au moins, lui, il a maintenant 400 dollars. » Une séquence où chaque geste résonne comme une note dissonante dans la symphonie des tensions rap congolais.
Ce ballet d’argent et d’ego survient dans un climat déjà surchauffé. Quelques jours plus tôt, Gaz Fabilouss avait enflammé la scène artistique en affirmant que les dix-huit rappeurs ayant collaboré au phénomène “Kabasele” ne possédaient pas « même 300 dollars » sur leurs comptes. Une déclaration perçue comme un mépris flagrant, déclenchant une avalanche de répliques cinglantes. Fellow, l’un des talents du collectif, a répliqué par un freestyle incendiaire, tandis que Shiii prépare un titre vengeur baptisé “Mbwabilous”. Dans ce paysage conflictuel, la donation de Fabilouss à C2B prend des allures de provocation calculée – une mélodie enivrante mêlée d’arrière-goûts amers.
L’ambiguïté du geste interroge : réelle main tendue ou stratégie médiatique savamment orchestrée ? Alors que les projecteurs se braquent sur cette donation artistes RDC, C2B semble jouer la carte de l’apaisement en acceptant les billets, offrant à Fabilouss une tribune inespérée. Le rappeur, héritier revendiqué de l’esprit Wenge, maîtrise l’art des coups d’éclat comme un chef d’orchestre domine son pupitre. Cette scène théâtrale, où l’argent devient instrument de rivalité, soulève une question cruciale : la solidarité artistique peut-elle survivre aux egos surdimensionnés ?
Pendant ce temps, le clip de “Kabasele” continue son ascension fulgurante, transformant les tensions en combustible créatif. Véritable ovni musical de douze minutes, il cumule plus de 740 000 vues mondiales, se hissant en deuxième position des vidéos les plus regardées en RDC sur YouTube. Ces chiffres étourdissants témoignent du succès musique congolaise contemporaine, capable de transformer les clashs en chef-d’œuvres collectifs. Chaque plan du clip, où dix-huit voix se mêlent dans un hymne générationnel, rappelle que la scène urbaine congolaise vibre d’une énergie inégalée sur le continent.
Alors que les projecteurs restent braqués sur le duo Gaz Fabilouss C2B, la polémique ne doit pas éclipser l’essentiel : la vitalité créative d’une scène rap qui pulse au rythme de Kinshasa. Le succès retentissant de “Kabasele” prouve que les tensions, parfois, enfantent des chefs-d’œuvre. Reste à savoir si cette donation spectaculaire sera l’accord final d’une réconciliation ou le prélude de nouveaux feux croisés. Une certitude demeure : l’avenir du hip-hop congolais s’écrit dans ces confrontations électriques, où chaque note porte en elle l’âme tumultueuse du Congo.
Article Ecrit par Yvan Ilunga
Source: Eventsrdc