Le chant des enfants résonne comme un cri silencieux dans la nuit de Bunia. À quatre, cinq ou huit ans à peine, ils entonnent des mélodies qui disent leur souffrance sur le site de Kigonze. « Quand il y a la pluie, dormir devient impossible », confie une mère, serrant contre elle son nourrisson tremblant de fièvre. Depuis que les pluies diluviennes ont emporté leurs abris de fortune, des centaines d’enfants et de femmes âgées dorment à même la terre, exposés aux intempéries dans cette zone de l’Ituri en proie à une crise humanitaire aiguë.
Les toitures de bâches vétustes, dernières barrières contre les éléments, ont été balayées par les vents violents. Ce qui restait des fragiles habitations s’est transformé en bourbier, mélangeant eaux stagnantes et déchets. Les conditions de vie sont devenues un calvaire quotidien, particulièrement pour les femmes enceintes et les personnes âgées. « Aidez-nous avec des bâches et des couvertures », supplient les déplacés, les mains tendues vers un ciel indifférent.
Comment une région déjà ravagée par les conflits peut-elle absorber ce nouveau choc ? Les maladies hydriques prolifèrent dans l’indifférence quasi générale. Paludisme, infections respiratoires et diarrhées frappent en priorité les plus vulnérables, sans qu’aucune prise en charge médicale digne de ce nom ne soit organisée. Les enfants, déjà privés d’école depuis des mois, voient leur santé se dégrader jour après jour. Combien devront payer de leur vie cette double peine : fuir la violence des hommes pour affronter la violence des éléments ?
Dieudonné Mateso, président des sages du site, lance un appel désespéré : « Nous condamnons ces violences armées qui brûlent l’Ituri. Le gouvernement doit rétablir la sécurité dans nos villages de Djugu ». Son plaidoyer résonne comme un écho aux milliers de déplacés qui ne rêvent que d’un retour au foyer. Mais comment reconstruire quand les pluies transforment les sites d’accueil en pièges mortels ?
La tragédie de Kigonze n’est malheureusement pas isolée. Autour de Bunia, d’autres sites connaissent le même enfer hydrique. Cette crise des pluies qui frappe les déplacés de RDC révèle l’urgence d’une réponse coordonnée. Entre les abris détruits, les enfants sans protection et les maladies qui gagnent du terrain, c’est toute une génération qui risque de sombrer. Jusqu’à quand devront-ils chanter leur souffrance avant que leurs voix ne soient enfin entendues ?
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net