Le grondement des moteurs s’est brutalement tu ce mercredi 23 juillet au-dessus d’Ishango. Dans ce site historique du Nord-Kivu où le fleuve Congo serpente entre les collines, un avion Bat Hawk assurant la surveillance du parc national des Virunga s’est abîmé au sol, emportant deux vies. « Perdre Claude et Daniel, c’est comme voir deux baobabs s’écrouler d’un seul coup », murmure un collègue éco-garde sous couvert d’anonymat, la voix nouée par l’émotion.
L’Institut Congolais pour la Conservation de la Nature (ICCN) a confirmé dans un communiqué officiel ce crash aérien dramatique : Claude Nguo, pilote chevronné, et Daniel Kwamire, éco-garde dévoué, ont péri sur le coup alors qu’ils protégeaient « des agents en opération dans le Parc ». L’appareil effectuait une mission de sécurité routinière au-dessus de ce territoire miné par les conflits quand la tragédie s’est produite.
« Les services compétents, notamment l’Autorité de l’Aéronautique Civile, ont été immédiatement saisis », précise l’ICCN, annonçant le lancement d’une enquête pour déterminer les circonstances exactes de cet accident à Ishango. Mais dans les couloirs du parc, une question brûle les lèvres : jusqu’à quand ces héros de l’ombre paieront-ils le prix du sang ?
Le Parc des Virunga, qui célébrait récemment son centenaire, compte son martyrologie à l’encre rouge : plus de 200 éco-gardes tombés ces vingt dernières années. Balles perdues, embuscades, accidents… et désormais ce crash qui ajoute une nouvelle ligne funèbre au registre. « Nous risquons notre peau chaque jour pour protéger ce patrimoine, mais avec quels moyens ? », interroge amèrement un garde forestier croisé à Beni.
L’ICCN réaffirme pourtant « son engagement indéfectible à garantir la sécurité de son personnel » dans son communiqué. Pourtant, sur le terrain, les agents dénoncent des équipements vétustes et des conditions périlleuses. Ce crash du Bat Hawk vient cruellement rappeler leur vulnérabilité face à l’immensité des défis sécuritaires et logistiques.
Alors que l’enquête sur cet accident aérien de l’ICCN débute, les familles des victimes enterrent leurs morts. Claude Nguo laisse une femme et trois enfants. Daniel Kwamire, lui, était père de deux jumeaux. Derrière les communiqués officiels, c’est tout un écosystème humain qui tremble. Le drame d’Ishango pose une question cruciale : comment protéger ceux qui protègent l’une des dernières sanctuaires de biodiversité africaine ?
Alors que les éco-gardes morts au Virunga se comptent par centaines, ce nouvel incident sonne comme un avertissement sévère. Le parc peut-il continuer sa mission vitale sans renforcer radicalement la sécurité de ses gardiens ? L’enquête déterminera les causes techniques du crash, mais la réponse politique, elle, tarde désespérément depuis deux décennies de sacrifices.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd