Marie Kabasele, mère de trois enfants dans le quartier de Matonge, montre une facture froissée : « Payer 120 dollars pour un mois sans lumière ? C’est un vol organisé ! » Son témoignage résume le calvaire quotidien de milliers de Kinois. Face à ces abus électricité RDC, la Nouvelle Société Civile Congolaise passe à l’offensive.
Jonas Tshiombela, coordonnateur de l’organisation, a lancé une campagne SNEL sans précédent. « Notre combat est double », explique-t-il dans une interview exclusive. « D’abord, dénoncer les coupures intempestives et les surfacturations qui étranglent les ménages. Ensuite, responsabiliser ceux qui bénéficient d’un service régulier mais refusent de payer. » Une approche pédagogique qui vise à rétablir l’équilibre dans un secteur en crise.
La méthodologie est ancrée dans le terrain. Des comités locaux arpenteront les 24 communes de Kinshasa pour recueillir des preuves tangibles : factures incohérentes, compteurs défectueux, ou encore quartiers entiers plongés dans le noir pendant des semaines. « Chaque dossier sera analysé avant d’être remonté aux autorités », précise Tshiombela. Comment la SNEL justifie-t-elle ces dysfonctionnements systémiques ?
Derrière cette campagne, c’est tout le modèle de facturation SNEL qui est questionné. À Ngaliema, des habitants dénoncent des tarifs calculés « au jugé », sans relevé de compteur. « Quand on réclame une régularisation, on vous menace de coupure définitive », soupire un commerçant sous couvert d’anonymat. Ces pratiques alimentent un cercle vicieux : les usagers lésés boycottent les paiements, aggravant la crise financière de l’entreprise publique.
La justice énergétique Kinshasa devient ainsi un enjeu social brûlant. Les plus pauvres subissent des préjudices disproportionnés, contraints de dépenser jusqu’à 30% de leurs revenus dans des groupes électrogènes ou des lampes solaires de fortune. « La SNEL transforme l’électricité – un droit fondamental – en privilège de riches », dénonce une activiste jointe par nos soins. Jusqu’où cette inégalité peut-elle s’étendre sans exploser ?
Cette initiative citoyenne soulève aussi des questions structurelles. Le réseau vétuste, miné par des décennies de sous-investissement, ne couvre que 20% de la capitale. Pourtant, la Nouvelle Société Civile Congolaise refuse le fatalisme. « Collecter des données fiables est la première étape vers un plaidoyer efficace », insiste Tshiombela. Des rencontres avec la direction de la SNEL sont déjà prévues pour exiger des audits indépendants.
L’espoir renaît dans des quartiers comme Limete, où des volontaires forment déjà les riverains à relever leurs index. « Enfin, on nous écoute ! » s’exclame un jeune recenseur. Mais le chemin reste semé d’embûches : pression sur les lanceurs d’alerte, lenteur administrative, et résistance culturelle au paiement régulier. Cette campagne SNEL parviendra-t-elle à briser les réflexes de méfiance ?
Au-delà des compteurs et des factures, c’est une bataille pour la dignité qui se joue. La réussite de cette mobilisation pourrait créer un précédent dans d’autres services publics défaillants. Car comme le rappelle amèrement Marie Kabasele : « Sans lumière, comment voulez-vous que nos enfants étudient ? Sans justice, comment croire en l’avenir ? » L’électricité, miroir cruel des fractures congolaises.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net