Le gouvernement rwandais a officiellement proposé Vincent Karega au poste d’ambassadeur en Algérie, selon une décision validée mercredi par le Conseil des ministres sous la présidence de Paul Kagame. Cette nomination intervient dans un contexte diplomatique complexe, marqué par le passé controversé du diplomate. Carriériste aguerri, Karega cumule les expériences sous haute tension, notamment son expulsion de République démocratique du Congo en octobre 2022, un épisode clé des tensions Rwanda RDC.
À Kinshasa, son mandat s’était achevé dans la tourmente. Accusé par les autorités congolaises d’ingérence dans le conflit de l’Est, son expulsion avait cristallisé la rupture des relations Kigali Kinshasa. Le gouvernement congolais l’avait déclaré persona non grata, l’accusant de soutenir les rebelles du M23. Cette mesure avait provoqué une crise bilatérale durable, illustrant la volatilité des rapports entre les deux voisins. Après cet épisode, Kigali l’avait désigné pour représenter le Rwanda auprès de l’Union européenne à Bruxelles. Un choix rapidement rejeté par la Belgique, qui refusa de lui octroyer l’agrément diplomatique sans en dévoiler publiquement les motifs.
Le parcours de Vincent Karega porte également les stigmates d’une autre crise majeure. Lorsqu’il était en poste à Pretoria comme ambassadeur en Afrique du Sud, l’assassinat de l’opposant rwandais Patrick Karegeya en janvier 2014 avait déclenché une onde de choc. Karegeya, ancien chef du renseignement rwandais et critique féroce de Kagame, fut retrouvé étranglé dans un hôtel de Johannesburg. Les soupçons pesant sur Kigali avaient alors envenimé les relations avec Pretoria, conduisant à une expulsion mutuelle de diplomates. Karega, alors représentant officiel, s’était retrouvé au cœur de cette tempête géopolitique.
La proposition actuelle de Vincent Karega ambassadeur en Algérie soulève donc des questions prévisibles. Comment Alger accueillera-t-elle un diplomate dont le curriculum vitae est émaillé de tels contentieux ? L’Algérie, acteur influent en Afrique, entretient traditionnellement une Rwanda Algérie diplomatie pragmatique mais mesurée. Les chancelleries observent déjà si cette nomination ne risque pas de réveiller des mémoires inconfortables, notamment auprès de la RDC où l’expulsion ambassadeur RDC reste un symbole des fractures régionales.
Analystes et observateurs s’interrogent sur la stratégie rwandaise. En plaçant Karega à Alger, Kigali cherche-t-il à valoriser son expérience des dossiers sensibles ou minimise-t-il les répercussions de son passé ? Certains experts y voient une tentative de redéploiement dans un pays moins impliqué dans les conflits des Grands Lacs, où ses antécédents pèseraient moins. D’autres estiment que cette décision pourrait tester la résilience des relations algéro-rwandaises, surtout si des partenaires comme la Belgique ou l’Afrique du Sud expriment des réserves discrètes.
L’avenir immédiat dépendra de la réponse algérienne. Si Alger valide l’agrément, elle devra gérer les éventuelles réactions de voisins comme la RDC, toujours en proie à l’instabilité dans sa région orientale. Un refus, en revanche, serait un camouflet pour Kigali après l’échec bruxellois. Cette nomination dépasse ainsi le simple jeu des chaises musicales diplomatiques : elle reflète les calculs subtils d’un Rwanda soucieux de son rayonnement, mais confronté aux ombres portées de ses anciennes crises. La crédibilité de la Rwanda Algérie diplomatie en sortira éclairée, pour le meilleur ou pour le pire.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd
