Dans un quartier de Goma aux murs criblés d’impacts de balles, Jeanne, mère de quatre enfants, montre le sac de farine reçu d’OXFAM : « Sans cela, mes enfants dormiraient le ventre vide depuis des semaines. Mais que deviendrons-nous quand l’aide s’arrêtera ? » Son témoignage résonne comme un cri étouffé parmi les 1 200 000 personnes assistées par l’ONG en 2024 dans l’Est de la République Démocratique du Congo, un chiffre révélé lors d’une conférence de presse à Kinshasa.
Manenji Mangundu, directeur-pays d’OXFAM RDC, n’a pas caché son amertume : « La suspension du financement de l’USAID nous force à réduire drastiquement nos opérations. Comment expliquer à une mère que son enfant ne mangera pas parce que des décisions politiques lointaines assèchent l’aide vitale ? » Cette crise humanitaire dans l’Est Congo, qualifiée de « négligée » par les responsables, frappe pourtant des provinces déjà exsangues après des décennies de conflits armés.
De retour du Nord-Kivu, la délégation internationale – composée d’Abby Maxman (États-Unis), Béatrice Vaugrante (Canada) et Mangundu – a décrit des scènes de désolation. Vaugrante, la voix nouée, a relaté : « Des familles entières survivent sous des bâches percées, sans eau potable ni soins. L’accès aux populations vulnérables est entravé par les combats et les barrières bureaucratiques. » Son appel aux autorités congolaises est sans équivoque : faciliter d’urgence l’acheminement de l’aide avant que l’hécatombe ne s’aggrave.
Dans cette région où les conflits au Nord-Kivu ont déplacé plus de 6,9 millions de personnes selon l’ONU, OXFAM maintient pourtant ses efforts. L’organisation prévoit d’assister 150 000 personnes supplémentaires malgré le manque de fonds. Maxman insiste sur l’urgence systémique : « Sans paix durable, aucun sac de farine ne résoudra la crise. La communauté internationale doit comprendre que chaque dollar retiré condamne des innocents. » Une réalité cruelle dans un pays où 25,4 millions de personnes nécessitent une assistance humanitaire.
OXFAM, présent dans sept provinces dont l’Ituri et le Tanganyika, devient ainsi un acteur majeur face à l’effritement de l’aide internationale. Mais jusqu’à quand pourra-t-elle pallier le désengagement ? La question hante les humanitaires comme les bénéficiaires. Alors que les besoins explosent, le financement de l’USAID en RDC a chuté de 40% en 2023. Cette contradiction mortelle illustre le drame silencieux de populations prises en étau entre les conflits et l’indifférence globale.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net