Depuis Kampala où il vit ce qu’il qualifie d’« exil forcé », Thomas Lubanga Dyilo, ancien chef de milice iturien et ex-détenu de la Cour pénale internationale, lance une charge virulente contre les autorités congolaises. Dans des déclarations exclusives, l’homme clame subir une « persécution » systématique après avoir dénoncé « l’affairisme et l’incapacité des gouvernements provincial et central » de la RDC. Une position qui jette une lumière crue sur les fractures politiques persistantes dans l’Est du pays.
Le leader controversé rejette avec véhémence les accusations du Groupe d’experts de l’ONU concernant un prétendu soutien ougandais au Mouvement Révolutionnaire CRP. « La République d’Ouganda a une tradition avérée d’accueil des exilés politiques », affirme-t-il, tout en laissant planer une menace à peine voilée : « Si le Mouvement Révolutionnaire se retrouvait aujourd’hui à la porte de Kinshasa… » Cette déclaration, suspendue dans son non-dit, interroge sur les véritables ambitions du mouvement.
Avec une ironie mordante, Lubanga balaie les références à son passé judiciaire : « Cela relève du passé. On a l’impression que ce groupe d’experts fait de la CPI un épouvantail […] que le passage par la CPI oblige à croiser les bras face à un Gouvernement qui se complaît à voir enterrer vive sa population. » Le ton est donné : l’homme se présente en victime d’une instrumentalisation politique, clamant que « le Président Thomas Lubanga ne se laissera pas ébranler par ce genre d’attaque ».
Sa critique s’étend aux processus de paix régionaux, qualifiés sans ambages d’échecs retentissants. Le Processus de Nairobi ? Mort-né. Celui de Luanda ? Un leurre. Quant aux nouvelles initiatives de Doha et Washington, centrées sur les dialogues RDC-M23 et RDC-Rwanda, elles sont jugées « partielles » et « insuffisantes ». « Ce serait une grave erreur d’approche que de limiter la crise multiforme de la RDC à un accord sur l’exploitation minière », tonne-t-il, pointant l’impérieuse nécessité d’aborder la « crise de légitimité », le « chaos de l’Ituri », « l’absence de l’autorité de l’État » et les « détournements organisés par le Gouvernement central ».
Dans sa conclusion incendiaire, Lubanga prône une « démarche inclusive, globalisante et holistique », mais c’est sa dernière phrase qui résonne comme un coup de tonnerre : « Le salut de la RDC est dans la fin du régime de Monsieur Félix Antoine Tshisekedi. » Une déclaration qui, au-delà de son caractère séditieux, soulève des questions fondamentales : les processus de paix actuels sont-ils condamnés à reproduire les échecs passés ? La crise de l’Ituri peut-elle trouver une résolution sans adresser la crise de légitimité évoquée ? Et surtout, cette sortie musclée depuis l’exil préfigure-t-elle une nouvelle escalade dans l’instabilité régionale ? Autant d’interrogations qui pèsent lourdement sur l’avenir immédiat de la région des Grands Lacs.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd