Des cris déchirants ont déchiré l’air mardi matin à Zibiti. Sous une pluie battante, un camion chargé à ras bord de marchandises et de passagers a soudainement dérapé, projetant des corps comme des fétus de paille sur la route boueuse. « J’ai vu des gens voler en l’air avant de s’écraser », murmure un témoin encore sous le choc, les mains tremblantes. Ce tronçon Iga barrière-Mungwalu, dans le territoire de Djugu, vient d’ajouter cinq noms à la longue liste noire des accidents routiers en Ituri.
Aux alentours de 10 heures, ce véhicule en provenance de Bunia et filant vers Mungwalu a perdu le contrôle près de l’embranchement menant à Mabanga. Selon le rapport accablant de la police routière, le poids combiné de la cargaison et des passagers entassés aurait précipité la tragédie. Les premiers secours ont découvert un spectacle d’horreur : cinq corps sans vie gisant dans la boue, tandis qu’une dizaine de blessés gémissaient, membres brisés et têtes ensanglantées.
« C’est une hécatombe qui aurait pu être évitée », dénonce un membre de l’Association des Chauffeurs du Congo (ACCO/Mungwalu), joint par nos soins. Son association confirme le bilan funeste et l’évacuation urgente des survivants vers l’hôpital général de référence de Mungwalu. Parmi eux, plusieurs se battent encore entre la vie et la mort dans des salles de soins surchargées.
Mais au-delà du drame immédiat, une question brûlante s’impose : combien de morts faudra-t-il encore déplorer sur ces routes du Congo transformées en pièges mortels ? Les sources sécuritaires pointent sans détour le coupable principal : l’état délabré de l’axe Nizi-Mongbwalu, littéralement liquefié par les fortes pluies récentes. Dans cette région minière pourtant vitale pour l’économie locale, les nids-de-poule se transforment en cratères et les bas-côtés en ravins.
La police a bien ouvert une enquête pour déterminer les responsabilités précises, mais les habitants de Djugu n’y croient guère. « On nous promet des enquêtes après chaque accident, mais les routes restent des pistes de misère », lance amèrement un habitant de Mongbwalu. Cette tragédie souligne cruellement l’urgence d’investir dans la sécurité routière en RDC, où des milliers de kilomètres de routes ressemblent à des couloirs de la mort.
Alors que les familles des victimes préparent des funérailles dans la douleur, le camion accidenté gît toujours au bord de la route, carcasse tordue et silencieuse accusation contre l’inaction persistante. Quand donc les autorités comprendront-elles qu’en Ituri comme ailleurs au Congo, chaque route non réhabilitée est une sentence de mort prononcée contre des citoyens abandonnés ?
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net