Une enfant de dix ans, piétinée mortellement par un troupeau d’éléphants dans la cité d’Ankoro. Ce drame survenu au cœur du Tanganyika n’est pas un accident isolé, mais le symptôme d’une urgence écologique qui menace l’équilibre de toute la région. Selon le Parc national de l’Upemba, cette tragédie illustre l’effondrement progressif des frontières entre l’homme et la faune sauvage, une conséquence directe de l’envahissement des corridors vitaux des pachydermes.
Les autorités du parc, soutenues par l’Institut congolais pour la conservation de la nature (ICCN), pointent du doigt l’extension anarchique des terres agricoles. Ces activités humaines grignotent inexorablement les couloirs de migration ancestraux, transformant les routes séculaires des éléphants en champs de bataille silencieux. Privés de leur habitat traditionnel, ces géants en détresse se retrouvent acculés à s’installer durablement dans des zones qu’ils ne traversaient jadis que lors de leurs transhumances saisonnières. Le territoire d’Ankoro, autrefois simple passage, devient ainsi un piège mortel pour les communautés comme pour la faune.
Face à cette cohabitation forcée, les scientifiques ont déployé une solution technologique : six éléphants équipés de colliers GPS scrutent désormais les mouvements de leurs congénères dans la région. Ces balises, véritables sentinelles électroniques, permettront de cartographier en temps réel les déplacements chaotiques des troupeaux. Une avancée cruciale pour anticiper les collisions entre l’homme et l’animal, mais suffira-t-elle à désamorcer la bombe écologique ? Les données collectées nourriront des stratégies de conservation, mais le parc prévient : les éléphants ignorent les frontières administratives. L’échec cuisant d’une opération de refoulement menée entre 2015 et 2016 en témoigne amèrement.
La vérité est implacable : confiner ces mastodontes dans l’enceinte du Parc national de l’Upemba relève de l’illusion. Les pachydermes, poussés par un instinct de survie millénaire, franchiront toujours les barrières invisibles que l’urbanisation et l’agriculture dressent sur leur chemin. Cette réalité exige une refonte radicale de notre approche. Comment éviter que le conflit homme-éléphant ne transforme le Tanganyika en zone de guérilla écologique ?
La réponse, selon les gestionnaires du parc, réside dans une alliance renforcée avec les communautés riveraines. Des programmes de sensibilisation et des mécanismes de compensation pour les dégâts agricoles sont à l’étude pour bâtir une paix durable. Car chaque hectare de forêt rasé, chaque couloir de migration obstrué, rapproche un peu plus les éléphants des villages. Les colliers GPS ne sont qu’un outil ; l’issue dépendra de notre capacité à repenser la cohabitation homme-faune en RDC. Sans cela, le piétinement d’Ankoro risque de n’être qu’un prélude à d’autres tragédies annoncées.
Article Ecrit par Miché Mikito
Source: radiookapi.net
