Lors du 51ème Conseil des ministres présidé ce vendredi à la Cité de l’Union Africaine, Félix-Antoine Tshisekedi a tiré la sonnette d’alarme sur l’asphyxie administrative qui paralyse Kinshasa et les grandes agglomérations congolaises. Le Chef de l’État a fustigé une centralisation excessive des services publics, qualifiant cette situation de « contre-modèle de gouvernance » générant des « embouteillages chroniques coûteux en temps et en ressources ».
Dans une analyse cinglante, le Président a décortiqué les effets pervers de cette concentration urbaine : mouvements pendulaires massifs, pression insoutenable sur les infrastructures, et dégradation de la qualité de vie tant pour les administrés que pour les fonctionnaires. « Comment justifier qu’en 2025, un Kinois doive encore se rendre au centre-ville pour une démarche administrative élémentaire ? » s’interroge implicitement le discours présidentiel, pointant un déficit criant de justice spatiale.
La réponse du gouvernement se veut structurante : Tshisekedi exige l’activation immédiate des services publics dans chaque commune, mesure phare de cette décentralisation des services publics en RDC. Cette refonte territoriale s’accompagne d’une révolution managériale : l’affectation des agents « dans la mesure du possible » près de leur lieu de résidence. Une tentative de réenracinement communautaire de la fonction publique qui soulève toutefois des questions pratiques sur sa mise en œuvre.
Le Président a chargé le Vice-Premier ministre et les ministres de la Fonction publique et de l’Intérieur de piloter une étude de faisabilité devant déboucher sur un déploiement progressif, Kinshasa servant de laboratoire avant extension nationale. Cette feuille de route s’inscrit dans le sixième engagement du contrat de mandat Tshisekedi (2023-2028) visant à « renforcer l’efficacité des services publics ». Le chef de l’État en a fait la clé de voûte de sa promesse d’un « État de proximité ».
Cette ambitieuse réforme de l’administration publique en RDC représente-t-elle pour autant une panacée ? Si l’intention affichée de modernisation séduit, sa concrétisation devra surmonter d’immenses défis logistiques et culturels. La réussite de cette décentralisation des services publics nécessitera un remodelage complet des circuits décisionnels et des mentalités bureaucratiques. Le gouvernement parviendra-t-il à transformer l’essai sans créer de nouveaux déséquilibres territoriaux ?
À l’heure où le Programme de développement local des 145 territoires peine encore à montrer ses effets, cette nouvelle stratégie de gouvernance menée par Félix Tshisekedi semble osciller entre pragmatisme et pari politique. Le succès de cette modernisation de l’administration publique congolaise conditionnera non seulement la fluidité urbaine mais aussi la crédibilité même de l’action étatique auprès des citoyens. Prochaine étape : la publication de l’étude ministérielle qui déterminera si cette vision peut transcender le stade des déclarations d’intention.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd