Le cri d’alarme résonne dans la forêt équatoriale du Maniema. Sur la route nationale RN3, entre Osso et Lubutu, des chauffeurs épuisés contemplent leurs véhicules prisonniers d’un océan de boue. « Mon camion est coincé depuis trois semaines », témoigne Koffi, transporteur de denrées périssables, en désignant un bourbier engloutissant ses roues. « Mes tomates ont pourri. Comment nourrir Kisangani dans ces conditions ? »
Cette dégradation route Osso-Lubutu, longue de 120 kilomètres, s’est dramatiquement accentuée avec les pluies de mai. Le tronçon vital pour désenclaver la province ressemble désormais à un champ de bataille : la chaussée effondrée a cédé la place à des marécages impraticables où s’embourbent poids lourds et minibus. Une vingtaine de véhicules forment aujourd’hui un mur d’acier rouillé, bloquant toute circulation sur cet axe stratégique.
Les conséquences économiques sont brutales. « Avant, Osso-Kisangani prenait deux jours. Maintenant ? Une semaine si on a de la chance ! » s’indigne Mama Léontine, commerçante dont les poissons fumés ont tourné. La paralysie frappe surtout les produits agricoles : café, manioc et légumes pourrissent dans les bennes immobilisées, aggravant l’inflation locale. Face à l’urgence, certains optent pour des motos-taxis, au péril de leur vie sur les pistes détournées.
Dans ce chaos, une question brûle les lèvres des usagers : où va l’argent des péages ? À Lubutu et Osso, les barrières prélèvent scrupuleusement des frais sur chaque véhicule. « On paie chaque jour pour une route fantôme ! » tonne un chauffeur montrant son carnet de tickets. La colère gronde contre les autorités provinciales accusées de détourner ces fonds destinés à l’entretien des axes routiers.
Cette situation illustre un drame national : la RN3 impraticable symbolise l’abandon des infrastructures congolaises. Les bourbiers maniema RDC ne sont pas une fatalité climatique, mais le fruit de décennies de gestion opaque. Alors que le gouvernement promet la réhabilitation axes routiers Congo, les communautés du Maniema attendent des actes. Car derrière les véhicules bloqués Lubutu, ce sont des vies suspendues, des économies locales asphyxiées, et une région entière qui sombre dans l’isolement. Jusqu’à quand ?
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd