Dans les ruelles inondées de Moba, au cœur du Tanganyika, le désespoir se lit sur le visage de Josué, 24 ans. « Chaque nuit, nous dormons avec la peur que des hommes armés défoncent notre porte. Et le jour ? Je tourne en rond sans travail ni formation », confie-t-il, miroir d’une jeunesse sacrifiée. Son témoignage résonne avec le récent rapport du Parlement des Jeunes de Moba, document implacable dévoilé ce dimanche 13 juillet, qui dresse un état des lieux catastrophique de ce territoire congolais en juin 2024.
Le rapport jeunesse Moba, transmis à Radio Okapi, sonne comme un électrochoc citoyen. L’insécurité Tanganyika y est décrite en termes crus : multiplication des vols à main armée avec le pillage de 4 machines hors-bord et 14 panneaux solaires, maisons réduites en cendres par des incendies criminels, et justice populaire qui remplace l’État défaillant. Plus alarmant encore, deux médecins agressés par des militaires – symbole d’un système sanitaire au bord de l’implosion. Comment soigner une population quand ceux censés la protéger deviennent des prédateurs ?
Le chômage jeunes RDC constitue l’autre plaie béante. « Sans centres de formation professionnelle, nous sommes condamnés à l’immobilité », déplore Aminata, diplômée sans emploi depuis trois ans. Cette carence structurelle étrangle l’insertion socio-économique, transformant une génération entière en bombes sociales à retardement. Pendant ce temps, les routes agricoles, véritables artères économiques, se désagrègent, isolant les producteurs et asphyxiant le commerce local.
La nature elle-même semble se rebeller. Des inondations Moba ont submergé plusieurs quartiers, exposant les habitants aux épidémies et aux pertes matérielles. « L’eau a emporté nos récoltes et nos lits. Nous dormons dans la boue », témoigne une mère de famille du quartier Lukonzolwa. Ce drame environnemental illustre la vulnérabilité d’une population abandonnée à son sort.
L’éducation, dernier rempart contre l’obscurantisme, n’est pas épargnée. Le scandale du bulletin scolaire non remis cristallise la colère : des écoles retiennent ces documents essentiels malgré le paiement de 1 000 francs congolais par les parents depuis septembre 2023. « C’est un vol institutionnalisé ! », s’indigne un membre du Parlement des Jeunes. Cette rétention illégale prive les élèves de leur droit à la scolarité et sape la confiance dans les institutions.
Derrière ces constats accablants se pose une question cruciale : jusqu’à quand les autorités provinciales ignoreront-elles la détresse de Moba ? Ce rapport, fruit d’un monitoring citoyen minutieux, n’est pas qu’une liste de griefs. C’est un appel urgent à l’action face à l’enracinement de la pauvreté et de la violence. Alors que la jeunesse congolaise cherche désespérément des perspectives, le territoire du Tanganyika semble s’enfoncer dans une spirale infernale où chaque jour perdu creuse le fossé de la défiance. La balle est désormais dans le camp des décideurs : sauront-ils écouter ce cri du cœur avant l’explosion sociale ?
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net