La République Démocratique du Congo se trouve confrontée à un paradoxe économique alarmant : alors que des dizaines de milliers de jeunes intègrent annuellement le marché du travail, des métiers élémentaires comme la maçonnerie ou la conduite d’engins restent majoritairement occupés par des travailleurs étrangers. Lors du 51e conseil des ministres, le Président Félix-Antoine Tshisekedi a dénoncé cette fuite d’opportunités d’emplois congolais, soulignant que 70% des postes techniques dans les projets miniers échappent encore à la main d’oeuvre nationale RDC.
Comment transformer ce potentiel démographique en moteur de développement ? Le Chef de l’État lie explicitement cette faille structurelle à l’incapacité actuelle d’alimenter les projets structurants RDC comme le corridor de Lobito ou l’exploitation de manganèse dans le Kongo Central. « L’absence de qualification technique draine chaque année près de 200 millions de dollars vers des salaires étrangers », a-t-il martelé, dénonçant un double préjudice : économique et identitaire.
Trois mesures-chocs ont été annoncées pour inverser cette tendance. D’abord, tout investissement devra désormais intégrer la construction d’un centre de formation professionnelle Congo dans son périmètre opérationnel. Ensuite, le ministère des Métiers participera systématiquement à la conception des projets. Enfin, un quota budgétaire contraignant sera réservé à l’apprentissage dans « les filières innovantes adaptées aux besoins des secteurs vitaux ». Ces dispositifs visent explicitement les emplois jeunes Tshisekedi, pierre angulaire de son second mandat.
L’urgence est chiffrée : avec 1,5 million de nouveaux emplois congolais à créer annuellement d’ici 2028, la commission interministérielle mise en place devra proposer d’ici trois mois un cadre législatif contraignant. « Sans main-d’œuvre qualifiée, aucun accord minier ni infrastructure ne produira de retombées durables pour notre population », a insisté le Président. Cette réorientation stratégique place la formation professionnelle au cœur de la souveraineté économique, transformant le secteur éducatif en véritable usine à compétences.
Les observateurs notent toutefois un défi majeur : combler le décalage entre l’offre actuelle de formation et les besoins spécifiques des industries extractives et BTP. Le succès de cette politique reposera sur l’adaptabilité des cursus aux technologies utilisées dans les grands chantiers. Avec un marché du travail où 63% des jeunes de moins de 25 ans sont sous-employés selon la Banque Mondiale, cette refonte apparaît comme la condition sine qua non pour transformer la démographie congolaise en dividende économique plutôt qu’en facteur d’instabilité.
Article Ecrit par Amissi G
Source: Actualite.cd