Le grondement des moteurs s’est mué en cri de colère ce mardi à Kindu, capitale du Maniema. Des centaines de conducteurs de moto-taxis ont suspendu leurs activités pour exiger des comptes sur la gestion des fonds issus de la taxe conventionnelle qu’ils versent religieusement depuis neuf mois. Otchangi Osenge Trésor, président de la Force unitaire des motards indépendants, lance un appel poignant : “Nous payons 1 500 francs chaque jour, mais où va cet argent ? Pendant que Lubutu bénéficie de réhabilitations, nous au centre-ville, nous souffrons dans l’invisibilité”. Une question qui résonne comme un coup de poing dans le paysage des revendications transport RDC.
Chaque matin, ces artisans de la mobilité urbaine s’acquittent de l’équivalent de 0,5 USD avant même leur première course. Pourtant, ni les routes défoncées du centre-ville ni les infrastructures de base n’ont connu d’amélioration. “On nous promettait des stations aménagées, des points de secours, des formations”, soupire un conducteur croisé près du marché central, le visage strié de sueur et de frustration. “Regardez autour de vous : rien n’a changé depuis que nous cotisons”. Cette gestion fonds motards soulève des interrogations brûlantes sur la transparence financière province.
La colère des motards du Maniema ne date pas d’hier. Depuis des mois, leurs délégués frappent aux portes de l’Assemblée provinciale et des services du gouverneur. En vain. “Ce silence est une insulte”, s’indigne Otchangi. “Comment expliquer que des fonds collectés quotidiennement sur des milliers d’engins ne produisent aucun impact visible dans nos quartiers ?”. La taxe conventionnelle Kindu, présentée initialement comme un levier de développement local, se transforme en symbole de défiance citoyenne.
Derrière cette protestation moto-taxi Maniema se cache une réalité sociale criante. La majorité de ces conducteurs nourrissent des familles entières avec un revenu journalier ne dépassant guère 15 000 FC (5 USD). Le prélèvement de 1 500 FC représente donc 10% de leurs maigres gains. “Payer sans voir le retour, c’est comme jeter son argent dans le fleuve Congo”, compare amèrement un père de six enfants rencontré près du port. Cette saignée financière accentue la précarité dans une région où les alternatives économiques se font rares.
Les revendications des conducteurs sont claires : une audit indépendant de la taxe conventionnelle, une représentation équitable au comité de gestion, et surtout, une répartition des investissements qui inclut le centre-ville de Kindu. “Nous ne sommes pas contre la contribution, mais contre l’opacité”, précise Otchangi. “Montrez-nous les projets, les factures, les bénéficiaires !”. Cette exigence de transparence financière province dépasse largement le cadre des motards et touche à la crédibilité des institutions locales.
Cette crise illustre un malaise profond dans la gouvernance des ressources publiques en RDC. Quand des contribuables exigent simplement de savoir comment sont utilisés leurs deniers, ne pose-t-on pas les bases d’une démocratie participative ? Les autorités provinciales sauront-elles saisir cette occasion pour instaurer un dialogue constructif ? La réponse à ces questions déterminera non seulement l’avenir des transports à Kindu, mais aussi la relation entre l’État et ces travailleurs de l’ombre qui font battre le cœur économique de la région.
En l’absence de réaction officielle, les motards menacent d’intensifier leur mouvement. Un avertissement qui plane comme une ombre sur la ville, rappelant que la patience des contribuables a ses limites quand l’opacité prend le pas sur la redevabilité. L’enjeu dépasse la simple taxe conventionnelle : c’est la confiance dans les mécanismes de développement local qui se joue actuellement sur les routes poussiéreuses du Maniema.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net