La détention prolongée du journaliste Paz Miluta dans la prison de Kenge met en lumière des dysfonctionnements criants au sein de l’appareil judiciaire du Kwango. Huit jours après son interpellation, aucune audience n’a pu être tenue pour examiner son dossier, le tribunal de paix de la ville se trouvant dans l’impossibilité fonctionnelle d’exercer ses prérogatives.
Selon des sources judiciaires concordantes, la juridiction locale ne compte actuellement que deux magistrats, tous deux absents de leur poste et en congé à Kinshasa. Cette vacance institutionnelle a contraint le parquet à renvoyer le dossier vers une instance fantôme, incapable de statuer sur le sort du journaliste incarcéré. Comment une justice peut-elle s’exercer sans ses juges ? Cette situation interroge fondamentalement sur l’état de l’institution judiciaire dans cette province.
Le collectif des jeunes du Kwango a dénoncé avec véhémence cette léthargie procédurale lors d’une déclaration publique mercredi. « Nous fustigeons le dysfonctionnement de l’appareil judiciaire du Kwango, palpable dans cette affaire où aucun juge n’est présent à Kenge », a-t-il affirmé, qualifiant cette carence de « violation ostensible des droits » du journaliste. Le collectif exige « sans condition la libération urgente » de Paz Miluta et annonce un méga sit-in ce vendredi, assorti d’une campagne de pétition contre l’ensemble du corps judiciaire provincial.
Cette mobilisation fait suite à une manifestation massive samedi dernier, où des centaines de Kengeois s’étaient rassemblés devant le gouvernorat pour réclamer la libération du journaliste. Un mémorandum avait alors été déposé, resté sans réponse des autorités. L’Union nationale de la presse du Congo (UNPC) section Kwango rappelle que l’arrestation de Paz Miluta fait suite à ses reportages dénonçant des abus de pouvoir, notamment des arrestations arbitraires lors des jours fériés et des actes immoraux attribués à un magistrat local.
Le parquet de Kenge, qui avait initialement fixé l’examen du dossier devant le tribunal de paix, se trouve désormais dans l’incapacité de faire respecter son calendrier judiciaire. Aucune date alternative n’a été communiquée pour l’ouverture du procès, laissant le journaliste dans un vide procédural indéfini. Cette paralysie institutionnelle soulève des interrogations pressantes sur les garanties d’un procès équitable dans la région.
La situation de Paz Miluta cristallise les tensions entre la société civile du Kwango et une administration judiciaire accusée de défaillance systémique. Le reportage des prochaines 48 heures sera crucial : le sit-in annoncé pourrait amplifier la pression sur des autorités provinciales déjà sous le feu des critiques. L’absence persistante de magistrats à Kenge transforme une affaire judiciaire en test de crédibilité pour l’État de droit dans cette province congolaise. Jusqu’où cette impasse judiciaire peut-elle s’étendre sans réaction des instances supérieures ?
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd