Dans une déclaration lourde de sens, Massad Boulos, architecte clé de l’accord RDC-Rwanda 2025, a balayé d’un revers de main l’influence présumée de Joseph Kabila sur la résolution de la crise des Grands Lacs. Cet émissaire américain, conseiller Afrique de Donald Trump, a-t-il sciemment orchestré l’éclipse politique de l’ancien président congolais ? Sa réponse cinglante à Jeune Afrique sonne comme un réquisitoire : « Est-il vraiment influent ? C’est un facteur, mais c’est une affaire purement interne ».
Cette marginalisation assumée épouse étrangement le narratif officiel de Kinshasa. Patrick Muyaya, porte-parole du gouvernement, avait déjà qualifié Kabila « d’homme du passé », révélant une stratégie concertée de relégation. La médiation américaine Congo opère-t-elle ainsi un changement de garde subtil dans l’arène politique congolaise ? Les observateurs notent que cette synchronisation des discours n’est guère fortuite, dessinant les contours d’une nouvelle géométrie du pouvoir où Washington tient désormais la baguette.
L’accord du 27 juin, fragile cessez-le-feu né sous parrainage américain, consacre cette prééminence. Boulos enfonce le clou : « La résolution passe par un dialogue régional et international, pas par des calculs politiques internes ». Parole d’évangile ou realpolitik assumée ? Cette doctrine scelle la mainmise états-unienne sur le dossier congolais, réduisant les acteurs locaux historiques au statut de figurants. Le conseiller de Trump précise sans ambages : « Nous avons parlé avec le gouvernement congolais des réformes […] Le président Trump lui-même l’a fait ».
Mais au-delà du cas Kabila, c’est toute l’architecture régionale que Washington entend remodeler. Boulos promeut une vision holistique où « une RDC stable » conditionne la pacification de l’ensemble des Grands Lacs. Son plaidoyer pour des « réformes constitutionnelles ou autres » masque-t-il une ingérence déguisée ? L’émissaire se défend : « Nous n’interférons pas dans le détail des affaires intérieures ». Pourtant, son insistance sur les réformes internes comme clé de la « prospérité » régionale ressemble à une feuille de route imposée.
Quel avenir pour Kabila dans cette équation ? Ses reliquats d’influence au sein des appareils sécuritaires semblent désormais contrebalancés par son exclusion des négociations stratégiques. Les propos de Boulos actent-ils la fin d’une ère ou simplement sa métamorphose ? Une chose est certaine : Washington parie résolument sur Tshisekedi et ses alliés, reléguant l’ancien chef d’État au rang de vestige politique. La question de l’influence de Joseph Kabila se mue en épilogue d’un chapitre révolu.
Cette reconfiguration géopolitique interroge la souveraineté réelle de Kinshasa. Si la médiation américaine offre un cadre de dialogue, ne consacre-t-elle pas aussi une forme de tutelle ? Boulos clôt le débat par une profession de foi : « Notre but est la stabilité et la prospérité ». Mais à quel prix pour l’autonomie décisionnelle congolaise ? Le prochain acte de cette crise régionale se jouera dans l’équilibre périlleux entre appuis extérieurs et légitimité intérieure.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: mediacongo.net