Dans l’impitoyable théâtre géopolitique de l’Est congolais, un rapport confidentiel du groupe d’experts des Nations-Unies dévoile le maintien du pilotage rwandais sur la rébellion AFC/M23. Selon des documents consultés ce 2 juillet 2025, Kigali continuerait d’orchestrer les opérations militaires et les décisions politiques de ce mouvement qui contrôle désormais les capitales provinciales stratégiques de Goma et Bukavu.
Le dispositif de commandement apparaît clairement structuré : le « général » Sultani Makenga conserve la direction militaire tandis que Bertrand Bisimwa et Corneille Nangaa officient comme chefs politiques. Mais derrière cette façade congolaise, le rapport onusien établit que « les dirigeants de l’AFC/M23 reçoivent instructions et soutien du gouvernement rwandais et de ses services de renseignement ». Des contacts fréquents seraient maintenus via des intermédiaires clés comme le Rwandais-Congolais Fred Ngenzi Kagorora et le général Patrick Karuretwa.
L’évolution du rôle de Corneille Nangaa, ancien président de la CENI, illustre les tensions sous-jacentes. Initialement promu comme visage politique pour « congoliser » la rébellion, l’homme a été progressivement marginalisé par Kigali. Pourquoi ce revirement ? Le document révèle que le Rwanda reprocherait à Nangaa ses « ambitions personnelles » de marcher sur Kinshasa par la force. Une divergence stratégique majeure : si Kigali et le M23 souscrivent à un changement de régime, ils rejetteraient une campagne militaire directe vers la capitale congolaise.
Cette rébellion, réapparue en novembre 2021, s’est structurée autour de l’Alliance Fleuve Congo (AFC) officiellement lancée à Nairobi en décembre 2023. Son acte constitutif ne laisse planer aucun doute sur l’objectif ultime : « mettre fin au pouvoir de Kinshasa par tous les moyens ». Une proclamation qui soulève une question essentielle : jusqu’où les parrains régionaux entendent-ils pousser leur avantage militaire ?
Les récents succès de la rébellion M23 sont indéniables, avec le contrôle effectif des deux pôles économiques et politiques du Kivu. Mais cette mainmise sur Goma et Bukavu pourrait-elle se transformer en piège géostratégique ? Les experts notent que l’écartement de Nangaa révèle les limites imposées par Kigali à ses protégés. Une mise en garde implicite contre toute velléité d’autonomie excessive.
Alors que la communauté internationale examine ces révélations accablantes, le véritable enjeu réside dans la réponse concrète à apporter. Comment expliquer que malgré l’accumulation de preuves sur le soutien rwandais à la rébellion M23, la situation militaire continue de se dégrader ? La prochaine session du Conseil de sécurité s’annonce déterminante pour l’avenir de la région, alors que les populations civiles paient le prix fort de ce conflit par procuration.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd