Devant le Conseil de sécurité des Nations unies à New York, Hippolyte Mfulu Kingonzila, chargé d’affaires de la Mission permanente de la RDC, a révélé vendredi 27 juin 2025 que la feuille de route du retrait de la MONUSCO est désormais « mise en pause ». Cette annonce intervient alors que la situation sécuritaire et humanitaire dans l’Est du Congo s’est significativement dégradée depuis janvier 2025, compromettant le calendrier initial. Comment une transition responsable peut-elle s’envisager dans un contexte de conflit persistant ?
Initialement prévue pour mars 2024, la stratégie de retrait « progressif, responsable et durable » n’a pu être soumise dans les délais. La recrudescence des violences, notamment dans les provinces du Nord et Sud-Kivu où le groupe rebelle M23 étend son emprise, a contraint Kinshasa et la MONUSCO à revoir leur approche. Le 2 mai 2025, les deux parties ont présenté une note conjointe au Conseil de sécurité, intitulée « Transition du Sud-Kivu et désengagement de la MONUSCO ». Ce document souligne l’impossibilité d’appliquer le plan original dans un environnement aussi volatile.
Face à cette impasse, la diplomatie congolaise a opéré un revirement stratégique. Mfulu Kingonzila a explicitement sollicité un « renforcement du mandat » de la MONUSCO, arguant que « l’évolution de la dynamique du conflit » nécessite une réponse adaptée. Cette requête surprend dans un contexte de désengagement programmé, mais s’appuie sur une réalité implacable : l’Est de la RDC reste un théâtre d’opérations où les civils subissent des exactions quotidiennes. Un mandat renforcé pourrait-il inverser la tendance ?
Cette demande intervient parallèlement à la fin de la mission de la Force de la SADC (SAMIDRC), dont le retrait a été acté le 13 mars 2025. Le diplomate a rendu hommage aux soldats de cette force régionale, tout en soulignant que la MONUSCO se retrouve désormais en première ligne face à une crise multiforme. La fermeture du bureau de Bukavu le 25 juin 2024, symbole du désengagement au Sud-Kivu, contraste avec l’urgence sécuritaire actuelle. Pourtant, le mandat global de la mission onusienne a été prolongé jusqu’en décembre 2025 par le Conseil de sécurité, révélant une contradiction dans la politique internationale.
Les implications de ce report sont lourdes pour la stabilité régionale. La suspension du retrait de la MONUSCO soulève des questions sur la capacité des institutions congolaises à assumer seules la sécurité dans l’Est. Alors que la rébellion du M23 contrôle de vastes territoires, la communauté internationale semble tiraillée entre la volonté de désengagement et la crainte d’un effondrement sécuritaire. La note conjointe RDC-ONU suggère que le redéploiement ne pourra reprendre qu’avec une amélioration tangible des conditions sur le terrain – un scénario incertain dans l’immédiat.
Cette situation crée un paradoxe : la MONUSCO, dont le départ était planifié après deux décennies de présence, se voit réclamée comme un rempart contre la déstabilisation. Le conflit dans les Kivu, loin de s’apaiser, impose une reconfiguration des priorités onusiennes. La résolution 2746, qui encadrait le soutien logistique à la SADC, n’est plus opérante, accentuant la pression sur la mission. Dans ce contexte, le renforcement du mandat demandé par Kinshasa représenterait un retour en arrière stratégique, mais peut-être nécessaire au regard des risques de protection des civils.
L’avenir de la présence onusienne en RDC dépendra désormais de la réponse du Conseil de sécurité. Si le retrait reste l’objectif affiché, sa mise en œuvre nécessite des garanties sécuritaires encore absentes. La détérioration continue dans l’Est exige une réévaluation réaliste des capacités locales et internationales. Sans une solution politique inclusive et un désarmement effectif des groupes armés, toute transition risquerait d’aggraver les vulnérabilités des populations civiles, au cœur des préoccupations initiales de la MONUSCO.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd