Une avancée majeure dans la lutte contre le VIH/SIDA et la tuberculose se dessine au Maniema, où les populations longtemps marginalisées deviennent désormais des acteurs centraux des stratégies de santé publique. Grâce à l’initiative conjointe de l’ONG UWAKI Maniema et du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), soutenue financièrement par le Fonds mondial, une réunion historique a rassemblé autorités provinciales, militaires et représentants de groupes vulnérables.
Pourquoi cette inclusion change-t-elle la donne médicale ? Comme le rappelle Maître Didier Ilunga, coordonnateur Genre et Droits Humains chez UWAKI : “Ces catégories – professionnels du sexe, usagers de drogues injectables, personnes transgenres et hommes ayant des rapports avec d’autres hommes – formaient des poches de vulnérabilité oubliées dans notre lutte”. Or, leur exclusion alimentait silencieusement les épidémies, à l’image d’un feu couvant sous la cendre.
Le mécanisme est implacable : la stigmatisation empêche l’accès au dépistage tuberculose RDC et aux traitements anti-VIH, créant des réservoirs viraux mobiles. Judith Matala, vice-présidente d’une association de travailleuses du sexe, confie : “Nous vivions sans conscience des risques. Aujourd’hui, UWAKI nous a ouvert les yeux : nous allons nous protéger et sensibiliser nos pairs”. Ce réveil communautaire fonctionne comme un vaccin social contre la propagation.
Concrètement, les engagements pris lors de cette concertation sur les droits humains santé sont triples :
- Dépistage volontaire et régulier du VIH et de la tuberculose
- Adoption systématique de comportements préventifs
- Sensibilisation en cascade au sein des communautés
Déogratias Matala, membre des populations clés, résume la transformation : “Hier rejetés, nous sommes aujourd’hui considérés. Ce poids social nous donne le courage de nous faire dépister”. Une révolution psychologique aussi cruciale que les antirétroviraux.
Le programme JCCM (Jeunes Centres Communautaires Multi-Services), déployé dans la province grâce au soutien PNUD Fonds mondial, servira de levier opérationnel. Comment fonctionne-t-il ? Par un maillage territorial de centres offrant simultanément :
- Services de dépistage confidentiel
- Accompagnement psychosocial
- Distribution de matériel préventif
- Plaidoyer contre les discriminations
Cette approche holistique répond à un impératif épidémiologique : en RDC, les VIH SIDA populations vulnérables présentent des taux de prévalence 3 à 5 fois supérieurs à la moyenne nationale selon les études. Les ignorer reviendrait à combattre un incendie avec un verre d’eau.
L’analogie médicale est éclairante : inclure ces groupes revient à administrer un traitement à la racine de l’infection plutôt qu’à ses symptômes. Comme l’explique un expert sanitaire présent : “Leurs réseaux sociaux denses en font des relais naturels pour diffuser les messages préventifs – une chaîne de contamination inversée vers la santé”.
Reste un défi de taille : transformer ces engagements en actes durables. Les participants devront désormais affronter les barrières culturelles persistantes. Mais le pari est lancé : faire de ceux qui étaient hier des victimes invisibles les héros de demain dans l’éradication du VIH/SIDA et de la tuberculose au Maniema. Une leçon de santé publique qui dépasse les frontières congolaises : aucune épidémie ne se vaincra en laissant des populations entières sur le banc de touche.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net
