Le 30 juin, tandis que la République Démocratique du Congo célèbre son indépendance, une voix singulière s’élève au sein du paysage médiatique. L’ONG Leadership des Femmes des Médias (LFM) interpelle la nation : « Notre liberté se construit chaque jour, dans chaque parole librement prononcée, dans chaque histoire racontée avec courage ». Pour ces militantes, l’émancipation nationale reste incomplète sans l’égalité réelle des femmes devant les micros et dans les salles de rédaction.
Quel sens a la souveraineté quand 52% de la population congolaise peine à faire entendre son analyse des enjeux nationaux ? Cette question centrale traverse le plaidoyer de l’ONG LFM qui transforme la commémoration historique en cri de ralliement. Nancy Clémence Tshimueneka et ses consœurs rappellent que les combats de 1960 trouvent leur prolongement dans la lutte actuelle pour une presse inclusive au Congo. Derrière les caméras de la RTNC ou dans les rédactions des médias privés, trop de Congolaises restent cantonnées à des rôles subalternes, leurs expertises minorées.
L’analyse de LFM révèle une contradiction criante : comment bâtir une démocratie robuste quand la moitié des expériences sociales sont sous-représentées dans le débat public ? L’organisation documente depuis des années les plafonds de verre dans les médias RDC. Seulement 22% des éditorialistes politiques sont des femmes, et moins de 15% dirigent des rédactions. Pourtant, leur présence aux postes décisionnels changerait la narration des crises, des programmes sociaux ou des processus de paix. « Chaque femme qui prend sa place dans les salles de rédaction, devant les caméras et au cœur des décisions est une victoire contre l’oppression », martèle le mouvement.
Concrètement, l’égalité médiatique défendue par cette ONG repose sur trois piliers : un environnement professionnel respectueux bannissant le harcèlement, des politiques de recrutement équitables, et surtout l’accès aux postes où se fabrique l’information. Ces revendications touchent à l’éthique même du journalisme congolais. Peut-on prétendre refléter la société quand on en exclut systématiquement les perspectives féminines ? Les auditrices de Radio Okapi ou les téléspectatrices de Digital Congo attendent des reportages sur les maternités sans médecin, les fermières du Kivu ou les commerçantes des marchés de Kinshasa – des angles trop souvent absents.
À l’heure où la RDC affronte des défis complexes, la voix des femmes dans les médias n’est pas un accessoire, mais un carburant démocratique. Comme le souligne LFM, une presse réellement inclusive devient le baromètre d’une indépendance accomplie. Le 30 juin doit désormais symboliser cette double libération : celle d’un peuple et celle du potentiel féminin entravé. Le chemin reste long, mais chaque reportage signé par une journaliste congolaise, chaque débat télévisé équilibré, chaque direct assuré par une présentatrice consolide l’édifice national. La vraie indépendance sera celle où toutes les Congolaises pourront dire : « Notre histoire est enfin racontée ».
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd