Dans un geste lourd de symboles, le Président Félix Tshisekedi a validé lundi la nomination d’André-Alain Atundu Liongo comme expert au sein du Conseil national de sécurité (CNS). Ce retour aux avant-postes de l’État congolais d’une figure historique du renseignement national interroge sur les orientations sécuritaires du pouvoir face à la crise persistante dans l’Est du pays.
Qui mieux qu’un ancien patron du Service national d’intelligence et de protection (SNIP) pour conseiller le chef de l’État sur les dossiers sensibles ? Le parcours d’Atundu Liongo épouse les soubresauts politiques congolais : administrateur général des services secrets sous Mobutu, collaborateur de Laurent-Désiré Kabila, puis porte-parole de la majorité présidentielle sous Joseph Kabila. Sa rupture publique avec l’ancien régime en 2022, à dix mois de la présidentielle, avait scellé son ralliement à Tshisekedi. Un calcul politique payant, puisqu’il accède aujourd’hui au cœur du dispositif décisionnel.
Cette nomination au Conseil sécurité Congo intervient dans un contexte sécuritaire explosif. Alors que les provinces orientales subissent une agression multiforme, le président Tshisekedi cherche-t-il à renforcer l’expertise stratégique de l’institution ? La désignation de cet expert en renseignement RDC suggère une volonté de repenser la doctrine de défense nationale. Mais le choix d’un homme ayant navigué entre tous les régimes suscite des interrogations légitimes : représente-t-il une continuité ou une rupture avec les pratiques passées ?
Observateurs et acteurs politiques s’interrogent sur les implications réelles de ce parachutage. Depuis son basculement dans le camp Tshisekedi, Atundu Liongo s’est fait le chantre d’une ligne dure contre « l’agression » à l’Est, multipliant les prises de position en phase avec le discours officiel. Son entrée au CNS consacre-t-elle l’avènement d’une nouvelle stratégie sécuritaire Congo plus offensive ? Ou n’est-elle qu’un habile placement politique récompensant la loyauté affichée ?
La nomination CNS RDC révèle surtout les tensions souterraines qui traversent l’appareil d’État. En ressuscitant un cadet du système mobutiste recyclé sous Kabila, le pouvoir actuel envoie un signal ambigu. Cette décision renforcera-t-elle la cohésion des services ou ravivera-t-elle les vieilles rivalités entre clans ? Le défi pour André-Alain Atundu Liongo sera de transformer sa légitimité historique en expertise opérationnelle tangible.
À quelques mois des échéances politiques locales, cette désignation relance le débat sur la gouvernance sécuritaire. Le CNS, instance clé de la stabilité nationale, gagnera-t-il en efficacité avec l’arrivée de ce vétéran du renseignement ? La réponse se mesurera à l’aune des prochaines décisions concernant l’Est du pays. Une certitude : dans le grand échiquier sécuritaire congolais, Tshisekedi vient de déplacer un pion expérimenté. Reste à savoir si ce jeu stratégique produira les effets escomptés sur un terrain miné par des conflits complexes.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net