Le président congolais Félix-Antoine Tshisekedi est à Luanda depuis ce lundi 23 juin 2025 pour le 17ème Sommet des affaires États-Unis-Afrique, un événement majeur orchestré par le Corporate Council on Africa. Avec plus de 1 500 délégués – chefs d’État, ministres africains, hauts responsables américains et dirigeants d’entreprises – ce forum cristallise la nouvelle dynamique des relations économiques transatlantiques. Le thème « Les voies de la prospérité : une vision commune du partenariat » souligne l’ambition africaine de transformer radicalement les termes de l’échange.
Dans son discours inaugural, le président angolais João Lourenço a martelé une évolution fondamentale : « L’Afrique n’est plus un continent de potentiel inexploité mais d’actions transformatrices ». Appelant à remplacer « la logique de l’aide par celle de l’investissement privé », il a positionné le continent comme un partenaire crédible, riche en ressources mais nécessitant capitaux et expertise. Son plaidoyer s’appuie sur un argument géopolitique subtil : les États-Unis, n’ayant pas colonisé l’Afrique, doivent adopter une vision renouvelée mutuellement bénéfique. La crise alimentaire et énergétique mondiale pourrait trouver ses solutions, affirme-t-il, dans cette alliance repensée.
Les minéraux stratégiques, pivots de la transition énergétique globale, occupent une place centrale dans ce repositionnement. Lourenço a insisté sur la nécessité de partenariats respectueux de la souveraineté, favorisant le contenu local et le transfert de compétences. Le corridor de Lobito – futur axe ferroviaire liant l’Atlantique à l’océan Indien – illustre ces « investissements structurants » qui redessinent la carte économique africaine. Un message clair est envoyé aux investisseurs américains : l’Afrique offre stabilité et vision à long terme dans un monde secoué par les crises au Moyen-Orient et en Europe orientale.
Cette offensive diplomatique coïncide avec un recalibrage stratégique de Washington. La doctrine « trade, not aid » (le commerce plutôt que l’aide), théorisée par le secrétaire adjoint par intérim aux Affaires africaines Troy Fitrell, se concrétise par un plan en six points visant à booster les échanges. Fitrell souligne : « Le commerce reflète un échange entre partenaires égaux, contrairement au paradigme antique du donateur et du bénéficiaire ». Cette philosophie trouve une application immédiate en République Démocratique du Congo, où l’administration Trump joue les médiateurs.
Un accord de paix entre la RDC et le Rwanda, négocié par Washington, sera signé par les ministres des Affaires étrangères des deux pays le 27 juin à Washington. Parallèlement, un accord minier RDC-USA est en cours de finalisation, visant à canaliser davantage d’investissements américains dans le secteur minier congolais. Cette double initiative s’inscrit dans la stratégie économique continentale des États-Unis, combinant stabilisation sécuritaire et pénétration commerciale. La présence du président Tshisekedi à ce Sommet États-Unis Afrique Angola prend ainsi une résonance particulière : la RDC apparaît comme un laboratoire de ce nouveau partenariat économique Afrique USA.
Les attentes africaines sont cependant exigeantes. Lourenço a appelé à une diversification des investissements américains au-delà des secteurs miniers et pétroliers, vers la sidérurgie, l’agriculture ou l’automobile. « L’Afrique est prête, nos gouvernements sont prêts à jouer un rôle de facilitateur » a-t-il assuré, évoquant la jeunesse du continent – 70% de la population a moins de 30 ans – comme levier d’innovation mondiale. Le défi pour Kinshasa sera de transformer ces déclarations d’intention en bénéfices tangibles : comment s’assurer que les futurs investissements USA RDC généreront bien des emplois qualifiés et un transfert technologique, plutôt qu’une simple extraction de ressources ? La réponse à cette question déterminera si ce sommet de Luanda restera un symbole ou deviendra un tournant historique.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd