À Niania, territoire de Mambasa, l’air vibre d’une urgence silencieuse. Sous le soleil écrasant de l’Ituri, des dizaines de jeunes écoutent, visages fermés, les responsables du parlement des jeunes. « Quand un militaire et un civil se regardent en ennemis, qui perd au final ? C’est toute notre communauté qui saigne », lance le président du Parlement des Jeunes de l’Ituri, la voix chargée d’une émotion palpable. Cette scène, samedi 21 juin, marque une étape cruciale d’une campagne de sensibilisation tournée vers la cohabitation pacifique RDC, après des tensions persistantes dans des centres comme Badengaido et Niania.
Ces localités, pourtant vitales pour le négoce régional, sont devenues le théâtre de relations civilo-militaires Ituri délétères. « Ici, un simple contrôle routier peut virer à l’affrontement verbal. La méfiance est devenue notre quotidien », confie Alain, 24 ans, vendeur de manioc. Le parlement des jeunes, fer de lance de cette initiative, cible précisément ces frictions. Leur message, martelé sans relâche : « Les jeunes ont intérêt à soutenir les efforts des forces armées ». Une évidence ? Pas dans cette zone où certains perçoivent encore les uniformes comme une menace plutôt qu’une protection.
Mais pourquoi cette défiance persiste-t-elle ? Les racines plongent dans des années de conflits complexes, où certaines exactions passées ont laissé des cicatrices profondes. Pourtant, comme le souligne le président du parlement des jeunes Ituri, « sans collaboration, comment espérer vaincre les groupes armés qui rodent encore ? ». La campagne, méthodique, alterne témoignages de militaires et ateliers interactifs. « On explique le rôle des FARDC, mais aussi les recours légaux si un soldat dépasse ses droits », précise une animatrice. Cette approche duale est cruciale : elle évite tout angélisme tout en traçant une voie vers la réconciliation.
L’enjeu dépasse largement Niania. Dans une région minée par les violences intercommunautaires, chaque geste de rapprochement compte. « Si les jeunes et les soldats apprennent à dialoguer, c’est tout le tissu social qui se renforce », analyse un chef local. Les FARDC et civils doivent devenir des partenaires, non des adversaires. Cette sensibilisation jeunes Mambasa s’inscrit dans une stratégie plus vaste : prévenir les explosions de colère qui pourraient être exploitées par des forces malveillantes.
Reste la question centrale : ces efforts porteront-ils leurs fruits ? À Niania, des signes ténus d’espoir émergent. Après la séance, des militaires ont spontanément aidé des jeunes à décharger un camion de marchandises. « Petit geste, grand symbole », murmure une femme du marché. Mais le chemin sera long. Comme le résume amèrement un ancien combattant reconverti en fermier : « La confiance, ça se gagne à la sueur, pas aux discours ». Le parlement des jeunes l’a compris : leur campagne n’est qu’un premier pas. L’Ituri retiendra son souffle, espérant que ces graines de paix sauront germer sur une terre trop longtemps aride.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net