Des marteaux-piqueurs résonnent ce matin sur l’avenue du Tourisme, où des familles contemplent, impuissantes, les vestiges de leurs habitations emportées par les eaux. « Tout a été englouti en quinze minutes : nos lits, l’école des enfants, nos souvenirs », confie Mama Léontine, les yeux rivés sur les fondations éventrées de sa maison en tôle. Cette scène de désolation, familière aux riverains de Ngaliema, motive l’intervention urgente du génie militaire congolais, lancé dans des travaux de drainage ambitieux face à la recrudescence des inondations.
Le projet, d’une envergure inédite, consiste à construire 1,5 kilomètre de collecteurs pluviaux depuis le camp Tshatshi jusqu’au fleuve Congo. Ces canaux traverseront les segments les plus vulnérables de l’avenue, transformée en véritable piège lors des pluies diluviennes. Souvenez-vous : le 13 juin dernier, près de 100 mètres de chaussée avaient disparu sous les flots, fracturant la route et isolant des quartiers entiers. Des images de piétons pataugeant dans l’eau boueuse, leurs effets posés sur la tête, avaient alors fait le tour des réseaux sociaux.
« Les désordres naissent à l’intérieur du camp militaire. Notre mission est de capter ces eaux destructrices à la source », explique le lieutenant Godard Ditomene, superviseur des travaux, pointant vers les tranchées en cours d’excavation. Son équipe travaille contre la montre : quatre mois pour achever ce réseau secondaire d’exutoires, tandis que l’Agence congolaise des grands travaux (ACGT) promet parallèlement un mur de soutènement. Une coordination essentielle pour Jules Kabula, de la cellule communication de l’ACGT : « Ces deux ouvrages complémentaires sont le seul rempart durable contre l’érosion qui ronge nos infrastructures ».
Mais pourquoi cette avenue paie-t-elle un si lourd tribut aux intempéries ? Les experts pointent une urbanisation anarchique couplée à des canalisations obsolètes, incapables d’absorber les pluies tropicales de plus en plus violentes. Chaque saison des pluies ravive le cauchemar : glissements de terrain, maisons précaires emportées comme des fétus, et ces interminables embouteillages qui paralysent Kinshasa. Combien de familles devront encore vivre avec les pieds dans l’eau avant que ces travaux de drainage ne portent leurs fruits ?
Derrière les engins de chantier et les uniformes militaires, c’est toute la question de la résilience urbaine qui se joue. Ces collecteurs pluviaux représentent plus qu’une solution technique : un symbole de la bataille contre la précarité des quartiers populaires. Si le génie militaire réussit son pari, ce modèle pourrait s’étendre à d’autres points noirs de la capitale. Mais pour l’heure, les habitants retiennent leur souffle, scrutant le ciel avec angoisse à chaque nuage menaçant. Leur espoir ? Que ces canaux deviennent enfin les artères salvatrices qui manquaient cruellement à leur quotidien.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net