La province de l’Ituri affronte une inquiétante résurgence de la tuberculose avec 13 389 cas notifiés et 343 décès depuis le début de l’année 2024. Ces chiffres alarmants, révélés à l’occasion de la Journée mondiale de lutte contre la tuberculose célébrée ce 13 juin, dessinent le visage d’une urgence sanitaire régionale. Comment expliquer cette persistance dans une maladie pourtant évitable et curable ?
Le Dr Justin Mukonkole, coordonnateur provincial du Programme de lutte contre la tuberculose, pointe deux zones critiques : Djugu enregistre à lui seul 5 618 cas tandis que la zone de santé de Bunia subit une pression épidémique similaire. « Ces territoires concentrent les principaux foyers de transmission », explique-t-il, soulignant que la tuberculose demeure « un problème de santé publique majeur » en Ituri.
Derrière ces statistiques santé Ituri se cache une réalité complexe. Comme un feu de brousse attisé par le vent, la maladie progresse dans les zones enclavées où l’insécurité limite l’accès aux centres de soins. Sur les 36 zones de santé que compte la province, nombreuses sont celles qui manquent de personnel qualifié, de kits de diagnostic rapide ou même de médicaments essentiels. « Les cas affluent, les ressources manquent. On ne peut plus ignorer cette urgence », alerte le Dr Mukonkole.
Cette épidémie tuberculose RDC met en lumière des défaillances structurelles. La détection tardive des patients, particulièrement dans les milieux ruraux, compromet l’efficacité des traitements. Pourtant, rappellent les spécialistes, un dépistage précoce associé à une thérapie DOTS (Traitement de Courte Durée sous Direct Observation) permet une guérison dans 95% des cas. Mais comment appliquer ces protocoles quand les centres de santé manquent de microscopes ou de moyens de transport pour les prélèvements ?
La crise sanitaire Bunia illustre ce paradoxe criant : en plein XXIe siècle, une infection bactérienne connue depuis des décennies continue de faucher des vies par manque de solutions basiques. « Seul un effort collectif et durable brisera cette dynamique », insiste le coordonnateur, appelant à une mobilisation renforcée des autorités congolaises et des partenaires internationaux.
Face à cette situation, des mesures concrètes s’imposent : renforcer les capacités de diagnostic dans les zones reculées, déployer des unités mobiles de dépistage, et surtout, intensifier la sensibilisation communautaire. Car la tuberculose se nourrit aussi des idées reçues – comme la confusion avec la sorcellerie – qui retardent la consultation médicale. En cette tuberculose Ituri 2024, chaque jour perdu se compte en vies humaines.
L’OMS estime qu’un dollar investi dans la lutte anti-tuberculeuse génère 43 dollars de bénéfices socio-économiques. Un calcul qui devrait inspirer les décideurs : l’éradication de cette maladie ne relève pas seulement de la santé publique, mais d’un impératif de justice sociale pour les populations oubliées de l’Ituri.
Article Ecrit par Amissi G
Source: Actualite.cd