Dans un discours chargé de symbolique patriotique, Vital Kamerhe, président de l’Assemblée nationale, a sommé les députés congolais de transformer leurs vacances parlementaires en mission de combat contre la guerre au M23. Face à cette agression qualifiée de « complot extérieur », le numéro deux des institutions a martelé dimanche à Kinshasa une conviction mystique : « Quelle que soit la durée de la nuit, la paix vaincra ».
Le ton solennel employé par Kamerhe lors de la clôture de la session de mars révèle une urgence nationale. Derrière les métaphores bibliques – « la RDC est un patrimoine divin » – se cache un calcul politique précis. Ce discours intervient alors que les critiques fusent sur l’impuissance des institutions face à l’enlisement du conflit dans l’Est, où les fonctionnaires des zones occupées attendent toujours leurs salaires. Le président de l’Assemblée a d’ailleurs réitéré sa demande pressante au gouvernement sur ce point crucial.
Comment expliquer cette soudaine mobilisation parlementaire ? L’analyse des interpellations gouvernementales durant la session éclaire cette posture offensive. Sous la houlette de Kamerhe, les députés ont contraint plusieurs ministres à s’expliquer sur les dysfonctionnements de l’État, notamment les inégalités territoriales. « Les recommandations émises doivent concrétiser le Programme de développement local des 145 territoires », a-t-il insisté, dénonçant implicitement les déséquilibres budgétaires qui alimentent les frustrations régionales.
La véritable nouveauté réside dans le double défi lancé aux élus : Kamerhe leur ordonne de « prendre à bras-le-corps » le banditisme urbain qui ensanglante Kinshasa et la gestion catastrophique des déchets plastiques. Un aveu indirect que l’insécurité ne se limite plus aux zones de guerre. Ces fléaux urbains, longtemps relégués au second plan, deviennent soudain prioritaires – signe que la colère populaire gronde jusque dans la capitale.
Mais ce volontarisme affiché résistera-t-il aux réalités du terrain ? L’appel à « rejoindre les bases électorales » sonne comme un rappel à l’ordre pour des parlementaires souvent accusés de déconnexion. La guerre M23 en RDC sert ici de catalyseur à une prise de conscience plus large : l’État doit simultanément faire la guerre aux agresseurs externes et à ses propres failles internes.
Reste que ce discours ambitieux soulève des questions pratiques. Quels moyens concrets seront alloués pour lutter contre le banditisme urbain à Kinshasa ? Comment résorber les montagnes de déchets plastiques qui étouffent les centres urbains sans budget dédié ? Le gouvernement saura-t-il transformer ces exhortations en actions ? Les prochaines semaines, durant cette trêve parlementaire, serviront de test décisif pour mesurer l’impact réel de cette mobilisation institutionnelle.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net