Dans le Sud-Lubero au Nord-Kivu, une urgence médicale silencieuse menace des vies chaque jour. Les professionnels de santé tirent la sonnette d’alarme : l’absence d’unité transfusion sanguine Lubero force les hôpitaux à dépendre de centres distants de Rutshuru et Butembo. Un trajet rendu périlleux par l’insécurité chronique dans la région, compromettant l’accès rapide aux poches de sang vitales.
Le Dr Kombi Benjamin, médecin coordonnateur au centre de santé de référence de Kirumba, décrypte cette réalité alarmante : “Les conditions actuelles transforment chaque transfusion en course contre la montre. Quand un patient hémorragique arrive, nous devons souvent compter sur des dons familiaux en urgence”. Un système précaire où le sang, bien que testé pour les quatre marqueurs essentiels (VIH, hépatites B et C, syphilis), ne bénéficie pas des contrôles rigoureux d’un centre transfusionnel agréé.
Mais pourquoi cette situation persiste-t-elle dans une zone pourtant confrontée à des besoins croissants ? La réponse tient en trois mots : distance, insécurité et logistique. Les poches sanguines doivent parcourir des dizaines de kilomètres sur des routes impraticables et sous menace des groupes armés. Résultat ? Des retards critiques dans les interventions chirurgicales ou les prises en charge des victimes d’accidents. Cette pénurie sang Nord-Kivu transforme des cas curables en tragédies évitables.
Le Dr Kombi Benjamin insiste sur le volet sécurité sanitaire : “Un centre local permettrait non seulement de réduire les délais mais aussi de constituer des réserves testées selon les normes OMS. Aujourd’hui, même avec les tests de base, nous naviguons à vue. Seule une structure dédiée garantirait une traçabilité complète et une sécurisation optimale”. Son plaidoyer s’appuie sur des chiffres éloquents : près de 60% des décès maternels dans la zone sont liés à des hémorragies non contrôlées faute de sang disponible.
Cet appel résonne particulièrement en cette Journée mondiale du don de sang, placée sous le thème “Donner du sang, donner de l’espoir”. Le médecin lance un cri du cœur à la communauté : “Chaque don de sang au Sud-Lubero est un acte de solidarité qui sauve concrètement des vies. La mobilisation citoyenne est notre bouée de sauvetage immédiate”. Une invitation pressante à pallier l’inaction des autorités sanitaires provinciales.
La solution ? Elle passe par trois axes complémentaires selon les praticiens locaux : l’installation rapide d’une unité transfusionnelle à Kirumba, des campagnes régulières de sensibilisation au don de sang Sud-Lubero, et une sécurisation des couloirs d’approvisionnement vers Rutshuru. Car comme le souligne un infirmier sous couvert d’anonymat : “Qu’attend-on pour agir ? Chaque jour sans centre, c’est un pari sur la vie de nos patients”. Dans l’Est congolais où les crises s’enchaînent, le sang sécurisé reste le premier médicament… et la première victime des déserts médicaux.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net
