La princesse Nana Lingele serre le micro entre ses mains, sa voix portant le poids de siècles de tradition. « Nous ne pouvons plus tolérer que nos filles soient brisées », déclare-t-elle devant l’assistance silencieuse. Cette scène puissante s’est déroulée le 12 juin à Kinshasa, où les autorités coutumières ont pris une décision historique : ériger la lutte contre les violences basées sur le genre en priorité absolue.
Princes et princesses de l’Association Nationale des Autorités Traditionnelles du Congo (ANATC ASBL) ont transformé leur statut de gardiens des coutumes en celui de bâtisseurs de paix. Sous l’impulsion de l’ONG Femmes Main dans la Main pour le Développement Intégral (FMMDI), avec l’appui technique du PNUD et du gouvernement canadien, cet atelier s’inscrit dans le projet « Justice, Autonomisation et Dignité de la femme et jeune fille ». Un programme qui résonne comme un signal fort dans un pays où, selon des rapports onusiens, les violences sexuelles restent un fléau endémique dans l’Est.
« Comment pouvons-nous parler de développement quand la moitié de notre société vit dans la peur ? », interroge un chef traditionnel présent à l’événement. Cette question rhétorique touche au cœur du problème : l’égalité des sexes à Kinshasa et au-delà ne sera pas possible sans l’implication des détenteurs du pouvoir coutumier. Leur déclaration solennelle, lue par la princesse Lingele, ne se contente pas de condamner les violences. Elle propose une refonte culturelle en profondeur pour promouvoir une société congolaise où la dignité féminine n’est plus négociable.
Le rôle des autorités traditionnelles Congo dans ce combat est crucial. Elles qui règlent 80% des conflits en zones rurales deviennent désormais les sentinelles contre les violences basées genre RDC. Leur engagement va au-delà des mots : ils s’engagent à réviser les pratiques coutumières discriminatoires et à instituer des médiations communautaires. Une révolution silencieuse soutenue par la FMMDI ONG, active depuis cinq ans dans plusieurs provinces pour la défense des droits des femmes.
Ce projet dignité femme RDC pourrait bien créer un effet domino. Quand un chef de tribu interdit les mariages précoces lors d’une palabre, quand une princesse dénonce publiquement un violeur, le changement devient tangible. « Nos ancêtres nous regardent », confie un participant. La route reste longue, mais cet atelier a planté une graine d’espoir : celle d’une RDC où filles et garçons grandiront dans l’égalité des sexes, protégés par ceux-là mêmes qui incarnent la tradition.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net