Ils ont survécu à la peur des balles, aux privations dans la forêt, mais leur retour tant espéré tourne au cauchemar sanitaire. À Kisimba, dans le territoire de Walikale au Nord-Kivu, des centaines de familles déplacées par les violences de l’AFC/M23 regagnent péniblement leurs villages de Munsanga, Besse et Busakara. Un retour ombragé par une réalité implacable : comment se reconstruire quand les dispensaires locaux sont des coquilles vides ?
« Vivre cachés comme des bêtes sauvages, sans toit ni aide, c’était l’enfer », confie Lavie Changwi, secrétaire administratif du groupement Kisimba, la voix nouée par l’émotion. Des mois durant, ces populations ont enduré l’inimaginable – faim, maladies, exposition aux intempéries – loin de toute assistance humanitaire. Épuisés, ils ont choisi de braver les risques et de retrouver leurs foyers. Mais à quel prix ?
Leur résilience se heurte aujourd’hui à une pénurie criante de médicaments dans les postes de santé locaux. Une situation qui transforme chaque fièvre, chaque infection en menace vitale. « Imaginez une mère dont l’enfant grelotte de paludisme sans quinine disponible à moins de 50 km de marche », interroge amèrement Changwi. Cette carence médicale au Nord-Kivu n’est pas une simple difficulté logistique : c’est une bombe à retardement pour des organismes déjà fragilisés par des mois de misère.
Le cri d’alarme lancé par ce cadre de base est clair : « Sans appui urgent en médicaments, ce retour pourrait virer au drame sanitaire. » Les structures de santé, déjà précaires avant la crise, sont aujourd’hui totalement dépassées. La malaria, les infections respiratoires et les maladies hydriques risquent de faire des ravages parmi ces retournés vulnérables. La guerre AFC/M23 a peut-être quitté leur colline, mais une autre menace, silencieuse celle-ci, rôde dans les cases.
Cette crise à Kisimba illustre un défi plus large : comment garantir une réintégration durable après les déplacements massifs en RDC ? Le retour physique ne suffit pas. L’accès aux soins de base reste un droit bafoué pour des milliers de Congolais pris en étau entre conflits et carences de l’État. Si la communauté internationale se mobilise pour les urgences de guerre, qui se souciera de ces oubliés de la post-crise ? La question hante les nuits de Lavie Changwi : « Avons-nous traversé tout cela pour mourir faute d’un comprimé ? »
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd